J-1 avant le lancement de Marseille-Provence capitale européenne de la culture. Mais au côté de la cité phocéenne, la discrète Košice, en Slovaquie, est aussi Capitale européenne de la culture 2013. Deux villes pour une même ambition: tirer profit de ce label pour redorer leurs blasons.
Dernier jour de préparatif avant le lancement de la Capitale européenne de la culture… côté français. Car si les rebondissements du feuilleton Marseillais ont pu l'occulter (le premier directeur, Bernard Latarjet, a jeté l'éponge, la directrice adjointe a démissionné, Toulon a annulé sa participation et Aix l'a retardée…), Košice partage avec Marseille le prestigieux label.
Et alors que la cité méditerranéenne, accompagnée de 90 communes de Provence, attend ce week-end plusieurs centaines de milliers de personnes, son homologue européen dispose encore d'une précieuse semaine pour régler les derniers détails des festivités pour son inauguration, le 19 janvier.
Košice, késaco? A la frontière Est de l'Espace Schengen, cette cité de 240 000 habitants est la 2ème ville de Slovaquie.
C'est une ville industrielle, mais on aurait tort de la résumer à ses usines métallurgiques"
prévient Anna Vasseur, chargée de mission culturelle à l'ambassade de Slovaquie à Paris. Elle a vécu 25 ans à Košice et évoque "une ville dotée d'un riche héritage culturel et patrimonial, très cosmopolite, culturellement proche de l'occident, mais encore trop peu connue en Europe".
L'enjeu du label européen est d'autant plus grand pour Košice que c'est une opportunité exceptionnelle de sortir de l'ombre de Bratislava. Etre "Capitale européenne de la culture" pour s'affirmer face à la capitale d'un pays qui fête cette année ses 20 ans d'indépendance a d'autant plus de sens.
Succès non garanti
Créé en 1985, sur initiative gréco-française (Jack Lang et son homologue Melina Mercouri), ce titre de "Capitale européenne de la culture" est décerné l'Union Européenne depuis 2011 et l'élargissement de l'Europe non plus à une ville, mais à deux, dont obligatoirement une en Europe de l'Est.
Avec plus ou moins de réussite: ce "label" correspond moins à une récompense distinguant la richesse culturelle d'une ville qu'à un encouragement à mettre en œuvre un projet culturel ambitieux. Son atout: attirer l'attention, permettre de mobiliser de nombreux acteurs, des subventions publiques nationales et locales, des parrainages et mécénats.
Mais les budgets européens restent faibles au regard des ambitions. Pour les villes, le succès n'est pas garanti: pour Patras en 2006 ou Istanbul en 2000 les résultats ne furent pas à la hauteur des investissements.
Désignées en 2008, Marseille-Provence et Košice ont eu plus de quatre ans pour mettre en œuvre leurs projets. Elles partagent désormais un même objectif: transformer l'essai en un succès durable et redorer leurs blasons, qui en ont bien besoin.
Jean Vilar, conseiller municipal à Marseille et vice-président de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, confiait récemment à Télérama:
On n’a pas gagné Marseille 2013 parce qu’on était bon, mais parce qu’on était mauvais. Au fond, c’était plutôt l'occasion de donner un coup de main au canard boiteux de l’équipe".
Si Marseille entend faire passer au second plan les polémiques qui agitent sa vie politique et développer ses équipements culturels, Košice aspire aussi à dynamiser sa vie culturelle et artistique, et à la faire connaître au-delà de ses frontières.
Les réussites de Lille et Liverpool
A l'exemple de Lille, capitale de la culture en 2004, qui a attiré 9 millions de visiteurs et qui a permis de mettre sur les rails les évènements Bombaysers, Europe XXL, ou encore Lille 3000 et plus récemment Fantastic. Autre succès, Liverpool, capitale en 2008, qui a connu des records de fréquentation et un rebond économique.
Marseille, 1er port de France et quelque 850 000 habitants, fait figure de mastodonte méditerranéen au regard de la cité slovaque, enclavée entre la Hongrie, la Pologne et l'Ukraine.
Les deux villes s'associeront pour des projets communs, mais l'essentiel de la programmation est ailleurs. A Marseille et alentours, plus de 900 propositions artistiques sont prévues, et de grands chantiers devraient pérenniser les efforts menés: 10 nouveaux lieux culturels ont été créés, parmi lesquels le MUCEM, musée national des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée.
L'espoir d'un "miracle Bilbao"
Au total, 90 millions d'euros de budget (programmation et fonctionnement) ont été alloués à l'événement MP-2013. A Košice, des investissements plus importants ont également été alloués "à hauteur de 100 millions d'euros", estime le maire de la ville dans les colonnes du Monde. Un premier centre d'art contemporain a été créé, des bâtiments militaires ont été investis par des projets artistiques, et les évènements programmés présentent une grande variété (littérature, musique, cinéma, photographie, spectacle vivant, nouveaux médias…).
De quoi espérer un "miracle Bilbao" bis : en 1997, l'inauguration du musée Guggenheim avait provoqué le rebond économique et culturel de cette ville industrielle du nord de l'Espagne..