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Cameron menace de quitter l’Europe pour séduire sa droite

mercredi, 23 janvier, 2013 - 18:42

David Cameron promet d'organiser en 2017 un référendum sur le maintien ou non du Royaume-Uni au sein de l’Union. Une stratégie électoraliste pour rallier les eurosceptiques. Problème: les Britanniques ne veulent plus quitter l'UE selon un dernier sondage. Analyse de notre correspondant à Londres.

David Cameron promet d'organiser d'ici la fin 2017 un référendum sur l'appartenance du Royaume-Uni à l'Union européenne. Mais d'ici là, il lui demande de se "réformer".
Le premier ministre se défend d'être un "isolationniste" et de vouloir faire des Britanniques "les Norvégiens ou les Suisses de l'Europe". Mais il veut une Union européenne "flexible, adaptable et ouverte".

Je ne veux pas juste un meilleur accord pour mon pays. Je veux un meilleur accord pour l'Europe aussi. […] Mais en l'absence de réformes, le danger est que l'Europe échoue et que les Britanniques dérivent vers la sortie".

Rejoindre la meute des anti-européens

En fait, David Cameron menace parce qu'il grimace. Lors de trois élections législatives partielles fin novembre, le United Kingdom Independence Party (Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni, autrement dit pour le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne) est arrivé deux fois en seconde position derrière le parti travailliste mais devant les conservateurs et les libéraux-démocrates. "Le parti devient la troisième force de la politique britannique" s’est alors réjoui son chef de file, Nigel Farage.

Cette réalité, cumulée à la levée d’un barrage eurosceptique au sein du parti conservateur, ont fortement influencé un David Cameron en chute dans les sondages. Depuis un an, le Premier Ministre s’est ainsi rapproché de la meute des anti-européens, après avoir été dans un premier temps très prudent sur cette question centrale depuis son élection en mai 2010.

Séduire à droite de sa droite

Ses motivations s’avèrent donc avant tout électorales : à court terme, les troupes eurosceptiques et réactionnaires de Nigel Farage pourraient enregistrer une victoire lors des élections européennes de juin 2014, après être déjà arrivées en seconde position en mai 2009 avec 16,5% des voix. La menace réelle concerne pourtant l’élection générale qui se tiendra un an plus tard: David Cameron ne pourra jamais se faire réélire avec un parti de droite aussi puissant à ses côtés. Il lui faut donc séduire ses partisans.

Le premier ministre conservateur fait également face à la montée en puissance des eurosceptiques au sein de son propre parti. Le 24 octobre 2011, 81 des 307 parlementaires de son parti votent en faveur de la tenue d’un référendum sur l’Europe malgré l’avis explicite de leur direction.

Le piège des primaires

Rebelote un an plus tard lorsque 53 parlementaires conservateurs se sont opposés à la direction de leur parti en déposant un amendement contre le projet de budget européen.

Si ces échanges ont rappelé la lutte intestine du parti conservateur pendant les années 80 et surtout 90, la proportion d’eurosceptique sur les bancs parlementaires et ministériels conservateurs n’a jamais été aussi importante.

L’explication se trouve dans leur mode de désignation, des primaires à la mode UMP:

Avant les élections législatives, les parlementaires sont sélectionnés par les militants, pour qui la question de l’Europe est devenue bien plus importante ces dernières années"

explique Thomas Raines, responsable du programme de recherche européenne au sein du think tank Chatham House.

Une tendance lourde qui réduit encore la marge de manœuvre de David Cameron sur l'Europe.

Quoi qu’il en soit, cette stratégie eurosceptique est-elle la bonne?

D’après un sondage publié par le Sunday Times, pour la première fois depuis un an les Britanniques se montrent favorables au maintien de leur pays dans l’Union Européenne plutôt qu’à un retrait (40% contre 34%) si le référendum avait lieu aujourd’hui.

Comment expliquer ce retournement de l'opinion publique sur l'Europe?

La raison tient sans doute dans le fait que le débat sur l'Europe a enfin commencé et les arguments en sa faveur se multiplient. Les leaders du parti travailliste et le président américain Obama ont, notamment,clairement exprimé leur soutien au maintien du pays dans l’UE"

répond Peter Kellner, le président de l’institut de sondage YouGov. 

Levée de boucliers générale en Europe

"On ne peut pas faire l'Europe à la carte", s'étrangle le ministre Laurent Fabius.

Et d'expliquer que

L'Europe, mettons que ce soit un club de football, on adhère à ce club de football, mais une fois qu'on est dedans, on ne peut pas dire on joue au rugby"

Ajoutant sur France Info qu'une sortie de l'UE "risque d'être dangereuse pour la Grande-Bretagne elle-même".

La position de son homologue allemand, Guido Westerwelle est quasi identique.

L'Allemagne veut que le Royaume-Uni reste un membre actif et constructif de l'Union européenne. Mais faire son menu à la carte n'est pas une option."

Carl Bildt, le chef de la diplomatie suédoise, s'inquiète, lui, du risque de contagion: d'autres pays de l'UE pourraient suivre le mauvais exemple de David Cameron ce qui engendrerait une implosion de l'Union.

La flexibilité, ça semble bien, mais si vous ouvrez la voie à une Europe à 28 vitesses, à la fin il n'y a plus d'Europe du tout. Juste un fouillis". 




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