La situation semble ingérable au lendemain des élections générales, aucune coalition n’ayant obtenu la majorité au Sénat qui a un pouvoir de blocage politique. Pour sortir de l'impasse, la droite berlusconienne propose un deal à l'italienne: une présidence de la république de droite contre une présidence du Conseil de gauche.
Après la publication des résultats des législatives italiennes, un vent de panique a commencé à souffler sur l’Europe. Hier à Milan, la bourse dévissait. Comme la plupart des places financières d’ailleurs, tétanisées par l’absence de majorité au Sénat qui plonge l'Italie dans l’instabilité politique et économique.
A Rome, le message est passé. Mario Monti, le président du Conseil sortant, a réuni la gouvernance de la Banque centrale d’Italie et les ministres du Trésor et des Affaires européennes. Au terme de ce conseil de guerre, les participants se sont engagés à surveiller la situation pour intervenir au plus vite le cas échéant.
Quant aux politiques… ils réfléchissent. Mais sans attendre, Silvio Berlusconi tend la main au centre-gauche et aux centristes de Mario Monti.
Berlusconi pour une grande coalition à l'allemande
Il propose "au nom de la stabilité", de former une grande coalition sur le modèle allemand. En évitant bien sur d’y englober les parlementaires du Mouvement "5stelle". Mais pour son leader, Beppe Grillo, la question ne se pose même pas, le trublion refusant a priori de participer "à toute magouille".
Mais la proposition du Cavaliere risque de rester lettre morte. Du moins dans l’immédiat, les démocrates estimant que
l’expérience vécue durant les quinze derniers mois sous le gouvernement Monti a démontré l’impossibilité d’un accord politique avec Silvio Berlusconi".
Le fait que l’exécutif de technocrates qui avait donné lieu à la création de ce que les politiciens italiens ont rebaptisé "l’étrange majorité " a eu la vie dure. Durant les six derniers mois, la droite berlusconienne n'a eu de cesse de mettre des bâtons dans les roues du chef du gouvernement.
La gauche louche vers Beppe Grillo…
Lors d'une conférence de presse, Pierluigi Bersani, le leader du Parti démocrate et de la coalition de gauche, a laissé entendre qu’il pourrait ouvrir sa porte au parti fondé en 2009 par le comique génois. A condition bien sur, que les députés du Mouvement 5stelle oublient leur discours contre l’euro, l’Europe et les politiciens qu’il faut expédier à la casse. En somme, un appel à la responsabilité collective. Réponse du trublion : "Nous verrons thème par thème".
Une façon de dire que le soutien des "grillini" aux démocrates dépendra de la politique qu’il souhaite introduire notamment en matière d’économie et de finances. Une réponse surtout, qui ne laisse rien présager de bon en ce qui concerne la solidité d'un tel attelage gouvernemental. Les élus sous la bannière de Beppe Grillo étant, comme leur mentor, jugés politiquement instables et peu digne de confiance par une classe politique qu'ils rejettent.
…et Grillo veut Dario Fo à la présidence
La situation est encore plus compliquée du fait de l’élection du prochain président de la république, le mandat de Giorgio Napolitano étant arrivé à échéance. Avec les législatives par ailleurs, le chef de l’Etat est entré dans ce que l’on appelle en Italie "le semestre blanc".
Cela veut dire que Giorgio Napolitano ne peut plus prendre de décisions importantes à commencer par la dissolution des deux chambres. Du coup, l’idée d’un retour rapide aux urnes pour tenter de redresser la barre n’est même pas envisageable.
Pour sortir de la double impasse – pas de majorité aux deux chambres et plus de président de la République – certains élus proposent un "gentleman agreement".
Un chef d’Etat de droite contre un premier ministre de gauche"
confie une sénatrice de droite. Cela veut dire que la gauche accepterait de placer un homme de Silvio Berlusconi à la tête de l’Etat et qu’elle recevrait en échange le soutien de la droite pour former un gouvernement placé sous la houlette, par exemple, de Pierluigi Bersani, le patron des démocrates.
La classe politique doit trouver rapidement une solution, les deux chambres devant se réunir pour la première fois le 15 mars prochain. Ce jour là, ils devront élire les présidents du Sénat et de la Chambre des députés. Enfin, ils devront trouver un candidat pour le fauteuil de chef de l’Etat.
La chose s’annonce difficile, Beppe Grillo proposant le dramaturge et prix Nobel, Dario Fo.
Un grand écrivain certes, mais totalement dépourvu de l’expérience politique indispensable dans une situation italienne aussi inextricable.