Cannes. Son tapis rouge. Ses stars... et son manque flagrant de films européens. Ce mercredi s'ouvre la 66e édition du festival avec une production cinématographique européenne qui repose essentiellement sur les films français.
Trois pays européens en lice pour la Palme d'or. C'est le triste constat de cette nouvelle édition du Festival de Cannes. La France domine avec six films (sans compter les nombreuses coproductions avec d'autres pays). L'Italie et les Pays-Bas se contentent, eux, d'un film chacun.
Les festivaliers souhaitant voir ce qui se fait ailleurs en Europe risquent d'être déçus. L'Espagne fait une timide apparition avec un documentaire, Con la pata quebrada, de Diego Galan dans la catégorie Cannes Classics regroupant d'anciens succès du septième art restaurés pour l'occasion.
L’Allemagne, avec Résurrection, et Bends pour l’Angleterre, feront partie de la sélection Un Certain Regard. Quant à la Belgique, elle ne sera représentée que par un court-métrage, Mont-Blanc, dans la compétition dédiée à ce format.
La faute à la crise
Comment expliquer cette quasi-disparition du cinéma européen? Austérité budgétaire oblige, l'argent dévolu à la culture diminue d'année en année dans les pays de l'Union.
L’Espagne a vu ses aides publiques consacrées au cinéma passer de 123 à 55 millions d'euros, révèle l'AFP. La société Alta Films a ainsi récemment déposer le bilan. Elle s'était spécialisée dans la production et la distribution de films indépendants.
L’Italie subit un sort similaire. Les sommes dédiées à la culture se réduisent comme peau de chagrin (0,21 % en 2013). En février dernier, le gouvernement a même baissé de 4 millions d'euros ses investissements dans le cinéma italien.
Mais le cas le plus dramatique demeure celui du Portugal. En 2012, la production cinématographique du pays s'est tout simplement arrêtée. Motif ? La mort du ministère de la Culture et le gel des subventions fournies par l'Institut du cinéma et de l'audiovisuel (ICA).
Après une grande pétition lancée par de nombreux réalisateurs célèbres dans le pays, comme Miguel Gomes, une loi a été votée durant l'été 2012. Elle prévoit le retour des subventions. Les premiers versements ont déjà été effectués. Reste à espérer que le gouvernement puisse tenir sa promesse jusqu'au bout alors qu'il vient d'annoncer une énième cure d'austérité de 4,8 milliards !
France-Belgique, les systèmes qui marchent
La France, grâce au fonctionnement du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), s'en sort mieux que ses voisins. Cet établissement public serait assis sur un véritable trésor de guerre de l'ordre de 800 millions d'euros destiné à financer cette exception française. Une somme exorbitante pour le gouvernement français.
En novembre 2011, le président de la commission des finances du Sénat, demande une enquête auprès de la Cour des comptes. Le CNC disposerait de trop d'argent et en userait mal selon l'Inspection des finances. Depuis, une partie des sommes acquises par le CNC est reversée, tous les ans, à l’État. On murmure qu'elle attendrait entre 100 et 130 millions d'euros cette année.
Autre pays, autre modèle économique. La Belgique finance une partie de son industrie cinématographique grâce à la taxe Shelter créée en 2004.
Cette incitation fiscale permet aux entreprises de déduire une partie du montant de leurs bénéfices en investissant dans la production audiovisuelle. Les sociétés peuvent ainsi grâce à cette exonération fiscale importante rentabiliser plus facilement leurs films. Reste aux producteurs belges de retenir l'attention de du comité de sélection cannois, ce qui n'a pas été le cas cette année.
Une méthode qui séduit néanmoins de nombreuses productions étrangères. Le film Jappeloup, avec Guillaume Canet, fait partie des productions françaises qui ont bénéficié de cette taxe.