Les Romains vont élire leur nouveau maire dimanche. Les trois candidats promettent de rénover une ville délabrée. De belles paroles pour des électeurs qui ne croient plus aux promesses. Reportage.
Il pleut des cordes et Rome s’éveille. Aux arrêts d’autobus, des Romains attendent sous la grisaille l’air grognon. Non seulement il n’y a pas d’auvent pour s’abriter, mais il faut se faufiler entre les voitures garées aux arrêts de bus.
Dans la ville éternelle, les conducteurs ont l’habitude de laisser leurs automobiles n’importe où. De préférence en double voire triple file.
Le long du Tibre, les voies sont déjà encombrées. Dans le centre-ville la circulation est interdite. Seuls ceux ayant déboursé 450 euros pour obtenir un permis d'accès annuel peuvent rouler.
Le ras-le-bol des citoyens
De nombreuses rues sont bloquées depuis plusieurs mois par des travaux de voirie interminables et les automobilistes se retrouvent piégés dans des ruelles étroites pleines de nids-de-poule.
La situation est insoutenable. La mairie veut limiter le nombre de voitures en circulation dans Rome, mais les lignes d’autobus sont insuffisantes et très mal desservies. Quant au métro, n’en parlons pas ! Cela fait des années que la ligne est en construction, mais à chaque fois que les ouvriers creusent, ils tombent sur des vestiges antiques et le ministère des Beaux Arts bloque tout !"
s’énerve Paolo Meniccacci. Employé par les assurances Allianz. Ce quinquagénaire habite le quartier de la Cassia situé au nord de Rome et doit traverser toute la ville pour se rendre au bureau.
Tous les matins, c’est une véritable épopée! J’attends le bus pendant des heures. Il y en a peu et ils sont toujours pleins. J’ai essayé la vespa, mais, vu l’état des rues, j’avais tout le temps mal au dos."
confie-t-il.
Des promesses, toujours des promesses…
Les Romains sont pourtant invités à élire dimanche un nouveau maire dont la première tâche sera de tenter de remettre en état la ville. Les candidats en lice cette année : Gianni Alemanno, le maire sortant. Ignazio Marino, le cardiologue sponsorisé par la gauche. Et l’avocat Marcello De Vito, représentant du Mouvement 5 étoiles.
Le cahier des doléances est chargé. D’abord, rénover la chaussée, dans un état désastreux. Les pavés sont déchaussés, les nids-de-poule sont légion et brisent les suspensions des voitures.
Certaines avenues, comme la via Celio Vibena qui longe le Colisée, sont glissantes et les accidents se multiplient.
Les électeurs désirent également une ville plus propre. Tous veulent que la mairie s’engage à mettre en place un véritable plan de ramassage ponctuel des ordures. Car à certains endroits, comme près de la place Vittorio, le quartier chinois romain, les poubelles s’amoncèlent devant des immeubles récents.
Insécurité grimpante
Je n’ai pas envie de voter dimanche prochain! Les maires, qu'ils soient de droite ou de gauche, se foutent de nous. Ils promettent régulièrement d’améliorer les choses. Mais les décharges sont toujours pleines. Les riverains n'en veulent pas de nouvelles et refusent l'installation de nouveaux incinérateurs"
rapelle Elena.
Cette quinquagénaire élégante tient une petite mercerie, habite place Dante. Depuis quelque temps, le quartier est agité par les travaux de rénovation d’un immense bureau de poste qui va devenir le quartier général aux services secrets.
Toute la place est bloquée, on ne peut plus se garer. Mais avec l’arrivée des services secrets, le quartier va devenir plus sûr".
Car, dans la cité éternelle, la délinquance augmente au fil des saisons. Guerres de gangs, vols à main armée, assassinats et autres trafics de drogue salissent l’image d’une ville qui s'apparente, pour les touristes, à un lieu où cohabitent farniente et douceur de vivre.
Pour l'amour de Rome
Comme tous ses concurrents, Ignazio Marino, représentant de la gauche aux municipales, promet d’offrir un lifting complet à la cité éternelle :
Ce n’est pas de la politique, c’est l’amour pour Rome"
écrit-il. Des déclarations qui font rires dans tout Rome.
Il est très compétent, mais il devrait siéger au sein de la commission parlementaire sur la Santé au lieu de vouloir prendre la mairie de Rome. Quant à Gianni Alemanno, il n’a rien fait durant tout son mandat. La situation a empiré. La mobilité est toujours désastreuse. Et ne parlons pas de la sécurité ! Après avoir voté pour lui aux dernières municipales, cette fois-ci, je crois bien que je vais essayer Marino… Même si je ne crois pas à ses promesses"
confesse Roberto Moretti. Originaire de Naples, il travaille dans un café situé en plein centre-ville. Les politiciens, il les voit passer tous les jours et écoute avec attention leurs discours lorsqu’ils s’arrêtent pour prendre un capuccino.
Ils sont tous pareils, ils promettent et ne font rien. Cela me fait penser au film "Le Guépard". Tout changer pour que rien ne change. Et que ce soit Gianni Alemanno ou Ignazio Marino, le résultat sera le même. Rome sera encore sale, les bus ne fonctionneront pas, les gens crèveront de faim dans les rues. Mais il nous reste le soleil pour nous consoler comme disent les touristes…"