Le nombre d'étrangers naturalisés en France est en hausse après des années Sarkozy de durcissement des conditions pour acquérir la nationalité française. Manuel Valls veut doubler le nombre de naturalisés. La France serait alors dans la moyenne européenne, mais resterait loin du Royaume-Uni, pays où l'intégration par la naturalisation est la plus développée.
Réduites à portion congrue par Nicolas Sarkozy et Claude Guéant, les naturalisations en France sont reparties à la hausse depuis le changement de majorité et l'arrivée de Manuel Valls place Beauvau.
Entre juillet 2012 et juillet 2013, elles ont augmenté de 14%. Elles étaient encore de 95.000 en 2010, puis étaient brutalement retombées à 46.000 en 2012. Pour Manuel Valls, lui même naturalisé Français à 20 ans, c'est une priorité:
L'intégration des étrangers doit se faire par la naturalisation",
plaide le ministre de l'Intérieur, qui a assoupli la procédure depuis octobre dernier et veut repasser au dessus du seuil des 100.000 naturalisations annuelles. Cela replacerait la France dans la moyenne européenne tout en restant loin derrière le Royaume-Uni.
Pour obtenir la nationalité française par le biais de la naturalisation, le demandeur doit remplir plusieurs critères. Il doit être majeur et avoir été domicilié pendant 5 ans sur le sol français. Cette durée peut être réduite à 2 ans si l'intéressé atteste d'une validation de deux années d'études supérieures minimum en France ou s'il a rendu des "services importants" à la France, ce dernier critère étant pour le moins flou.
Enfin, il est nécessaire que le demandeur puisse attester d'un niveau en français suffisant, tant à l'écrit qu'à l'oral. Exit cependant le questionnaire à choix multiples jamais vraiment appliqué, le demandeur doit maintenant faire ses preuves lors d'un entretien. Depuis une loi de 2003, il doit également témoigner d'une "assimilation à la communauté française" en "adhérant aux valeurs de la République". Un crime ou un délit majeur rend toute demande irrecevable.
L'Allemagne naturalise de plus en plus de jeunes Européens
En 2012, l'Allemagne a naturalisé 112.300 étrangers (+5,1%), soit plus que l'objectif en France de Manuel Valls. Mais il faut tenir compte du très bas taux de natalité en Allemagne, et donc de la faible augmentation naturelle du nombre d'Allemands. La population reste néanmoins plus importante, bien que déclinante: un peu plus de 80 millions, contre 66 millions de Français.
Fait nouveau, les candidats à la naturalisation outre-Rhin sont de plus en plus souvent… Européens. Chassés de leurs pays par la crise économique, de plus en plus de jeunes du sud de l'Europe émigrent vers les plus riches lander comme la Bavière ou le Bade-Wurtemberg. Résultat, en 2012, les naturalisations de ressortissants de l'UE ont bondi de 19%, contre 5% de hausse toutes nationalités confondues, selon le Bureau statistique allemand Destatis. Parmi ces nouveaux Allemands, les Grecs sont en nette augmentation. Les ressortissants turcs constituent toutefois toujours la majorité des nouveaux naturalisés.
En Allemagne, le demandeur doit avoir résidé au moins huit ans sur le sol allemand de manière régulière, pouvoir assurer la subsistance aux membres de sa famille comme à lui-même, sans aides sociales et aides au chômage. Cependant, il peut prétendre à une naturalisation dès l'âge de 16 ans.
Il est possible de réduire la durée obligatoire de séjour sur le territoire à sept ans ou même à six ans si le demandeur est particulièrement bien intégré et parle particulièrement bien allemand.
Toute demande d'intégration doit être accompagnée d'une attestation de réussite au test de culture juridique et civile allemande et d'une connaissance générale de la constitution allemande (Grundgesetz). Le demandeur doit également attester d'une maitrise de la langue correspondant au niveau européen d'apprentissage B1, soit un relativement bon niveau.
En Espagne, la crise inverse la tendance
Avec le boom économique d'avant la crise, l'Espagne est devenue une terre d'accueil pour les candidats à la naturalisation. En 10 ans, de 2000 à 2010, le nombre de naturalisations a été multiplié par plus de 10: il est passé de 12.000 en 2000 à plus de 123.000 en 2010, dont une majorité de personnes issues des pays latino-américains (90.000).
Mais, avant même le retour de la droite au pouvoir en décembre 2011, l'Espagne a réduit le nombre de naturalisations alors que le pays s'enlisait dans la crise économique. 115.000 étrangers résidants en Espagne ont vu leur demande de naturalisation acceptée en 2011, selon les derniers chiffres de l'Observatoire permanent de l'Immigration. Et si les données pour 2012 n'ont toujours pas été rendues publiques, elles seront probablement de nouveau en baisse, le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy estimant que l'Espagne n'a plus les moyens d'accueillir, et, encore moins de naturaliser des étrangers.
Pour demander la nationalité, outre les cas de mariages, il faut pouvoir justifier de dix ans de résidence, sauf pour certains étrangers (latino-américains, Philippines, Guinée équatoriale, Portugal…), pour qui ce délai est réduit à deux ans. Les personnes ayant le statut de réfugié peuvent, eux, faire la démarche après cinq ans.
Royaume-Uni, durcissement des conditions d'accès
Le Royaume-Uni est aujourd'hui le champion de la naturalisation en Europe. En 2012, 194.344 étrangers ont été naturalisés britanniques, contre 177.878 en 2011 et une moyenne annuelle de 169.373 entre 2006 et 2010 et de seulement 45.886 entre 1995 et 1999. En 2012, le pays dont la population est à peine inférieure à celle de la France, a donc naturalisé quatre fois plus d'étrangers que l'Hexagone.
La moitié des nationalisations concerne des immigrés, l'autre moitié leurs partenaires ou leurs progénitures. En 2012, 3,5% seulement des demandes ont été refusées contre 3,9% en 2011 et 9.3% en 2005 et près de 20% en 1993.
S'il faut toujours avoir résidé cinq ans au Royaume-Uni pour être autorisé à demander la nationalité britannique, les critères nécessaires au regroupement familial se sont néanmoins durcis depuis l'arrivée au pouvoir des conservateurs en mai 2010.
Avec votre nationalité européenne, jusqu'au mois de juillet 2012 vous n'aviez qu'à être marié pour que votre épouse indienne puisse vous rejoindre ici"
sourit Jagdish Patel, le responsable de l'Association indienne de Brent, un quartier de la banlieue nord de Londres.
Depuis, vous devez justifier d'un salaire annuel de 18.600 £ (21.825 €) pour que votre demande soit acceptée et dès le 28 octobre 2013 votre épouse devra passer des tests officiels de langue anglaise d'un très haut niveau".