L'accord sur l'assurance chômage a finalement été signé. Parmi les mesures: une période de carence pour les chômeurs partis avec de grosses indemnités, et une possibilité de "recharge" des droits en cas de périodes travaillées. Intermittents, seniors et cadres mettront la main à la poche. Mais la france reste un des pays où les chômeurs sont les mieux indemnisés.
Petit toilettage pour l'assurance chômage. Les partenaires sociaux (syndicats et Medef) sont finalement parvenu à un accord, dans la nuit de vendredi à samedi, pour de nouvelles règles régissant les indemnités chômage en France.
Commençons par ce qui bouge: l'accord sur l'Unedic introduit des changements pour certains types de travailleurs/chômeurs, notamment les seniors et les intermittents, et instaure une possibilité de "recharge" des droits.
- Les seniors: les travailleurs de plus de 65 ans étaient jusqu'alors exonérés de cotisations Unedic. C'est terminé, ils devront désormais mettre eux aussi la main à la poche.
- Les intermittents du spectacle: le patronat voulait carrément supprimer leur statut, ce sera finalement des ajustements pour les quelque 112.000 intermittents en France. Le cumul mensuel salaire/allocations est désormais plafonné à 5.475 euros brut. Par ailleurs, les cotisations salariales augmentent, et passent de 10,8% à 12,8% (soit 8% assurés par l'employeur et 4,8% par le salarié).
- Les chômeurs avec grosse prime de départ: pour ceux qui quitteront leur emploi avec de grosses indemnités (c'est-à-dire supérieures à celles prévues légalement), le versement de l'assurance chômage est retardé. Un délai pouvant aller jusqu'à 180 jours en cas de très gros chèque, contre 75 jusqu'alors. Attention, cette carence ne concernera cependant pas les licenciés économiques. L'objectif, en plus des économies pour l'Unedic, est de dissuader le recours abusif aux ruptures conventionnelles, devenues bien souvent un moyen de mettre en préretraite les seniors. Une mesure qui touchera donc essentiellement les cadres, dont la Cour des comptes pointait du doigt en janvier 2013 le régime d'assurance chômage particulièrement favorable. La durée maximale d’indemnisation est, selon la Cour, deux fois plus longue qu'en Allemagne: 2 ans en France pour les moins de 50 ans, au lieu d’un an en Allemagne. Quant à l’allocation, elle est égale à 63% du revenu brut antérieur, un niveau jugé par les sages plus haut que nos voisins pour les bas revenus, mais surtout pour les plus hauts. Ainsi, un cadre français qui gagne 7.200€ net, a droit à une allocation de chômage de 5.012€, contre 2.200 € pour un cadre allemand.
- Pour tous les demandeurs d'emploi, l'accord Unedic crée enfin un nouveau dispositif: des droits "rechargeables". A partir du 1er juillet, les demandeurs d'emploi pourront accumuler les droits à indemnisation durant les périodes travaillées. Jusqu'alors, ils en perdaient une partie. Quand le chômeur arrive au bout de ses droits, Pôle emploi le "recrédite" des indemnités nouvellement acquises durant les périodes de chômage en réalité travaillées. Pour cela, un minimum de 150 heures de travail est nécessaire. Objectif: diminuer le nombre croissant des chômeurs qui basculent vers le RSA après avoir épuisé leurs droits.
Pour le reste, l'accord ne remet pas en question le montant des allocations, et leurs conditions d'attribution, c'est-à-dire des droits ouverts à partir de 4 mois de travail, et la règle selon laquelle un jour travaillé engendre un jour indemnisé. Il est toutefois l'occasion de revenir sur les niveaux d'indemnisation du chômage en France, et de le comparer à ceux de nos voisins.
Où en Europe les chômeurs sont-ils les mieux indemnisés?
Les pays du nord compensent le mieux l'ancien salaire
Le générosité d'un système s'apprécie sur plusieurs critères: les conditions d'octroi des indemnités, le montant de ces indemnités, leur durée de versement ou encore les obligations faites aux chômeurs en matière de recherche d'emploi.
Tout d'abord, il s'agit de voir dans quelle proportion le salaire que l'on a perdu est compensé par le versement d'une allocation chômage. Ce que l'on appelle "le taux de remplacement". Il est de 57% du salaire brut en France. Mais les comparaisons de taux effectif de remplacement sont très délicates.
La France compense plutôt bien l'ancien salaire, mais un certain nombre de pays vont au delà, comme la Suède, le Danemark, les Pays-Bas mais aussi la Belgique ou le Portugal. En plus, ces comparaisons varient en fonction des niveaux de salaires. En France, les bas salaires sont très bien compensés mais aussi les hauts salaires. En revanche les salaires à peu près médians sont moins gâtés.
Les "chômeurs riches" très bien indemnisés en France
Comme évoqué plus haut, les "chômeurs riches", c'est-à-dire les cadres, sont bien traités en France. Si l'on prend un salaire brut mensuel de 2.600€, un chômeur touchera plus de 2.000€ au Danemark, 1.560 en Allemagne et 1.490 en France. Mais pas plus de 1.100€ en Italie et moins de 380€ au Royaume-Uni. Il faut dire que ce dernier pays n'a pas comme principe de remplacer le salaire mais d'octroyer seulement une allocation permettant de survivre, quel que soit l'ancien revenu.
La réalité n'est pas la même si l'on considère le montant maximal des indemnisations perçues. Car Le plafonnement du salaire de référence est particulièrement élevé en France, certains chômeurs percevant jusqu'à 6.100 euros par mois.
Si l'on excepte la Suisse, où le plafond est quasiment à 7.000€, ce niveau est trois à quatre fois plus important que dans le reste de l'Europe. il est par exemple autour de 2.200€ en Allemagne et au Danemark, de 1.400€ en Belgique ou de 1.100€ en Italie.
Les Pays-Bas indemnisent le plus longtemps
La durée maximale d'indemnisation est offerte par les Pays-Bas – 38 mois – même si elle peut être encore supérieure en Belgique où cette durée est fonction de nombreux paramètres d'âge, de sexe ou de région.
Mais la France est quand même très bien placée avec une durée de 36 mois pour les plus de 50 ans. Pour les moins de 50 ans, le chômeur français bénéficie de 4 mois à 2 ans d'indemnisation en fonction de durée de l'activité précédente.
C'est comparable à ce qui se passe en Allemagne, au Danemark en Espagne ou au Portugal. Mais l'indemnisation maximale ne dépasse pas un an en Italie, en Suisse ou au Luxembourg. Et elle s'interrompt au bout de six mois au Royaume-Uni.
Quatre mois d'activité – quatre mois de chômage
En ce qui concerne l'accès au chômage , la France, là encore, offre à ses salariés des conditions favorables. Il suffit en effet de travailler – et donc de cotiser – quatre mois pour bénéficier d'une durée équivalente d'allocation chômage. Et cette durée de cotisation est strictement égale à celle de l'indemnisation chômage jusqu'à 24 mois.
C'est beaucoup plus généreux qu'en Allemagne où un an de travail ne permet de percevoir que six mois d'allocations, contre 12 en France. En Espagne ou en Italie, c'est encore plus dur puisque la durée de cotisation ouvre droit à une durée d'indemnisation trois fois plus courte.
Cela dit, les Pays-Bas et le Danemark offrent des conditions à peu près équivalentes à celles de la France. Au Danemark par exemple, il faut travailler un an pour avoir droit au chômage mais les chômeurs bénéficient tout de suite d'une durée de 2 ans d'indemnisation.