Après leur refus de participer au gouvernement Valls, retour à la case "partenaire" pour les Verts en France. Ailleurs en Europe, les Verts sont puissants en Allemagne et recueillent 5 à 10% des voix en Autriche, Pays Bas, Belgique ou Hongrie. Ils sont plus faibles au sud de l'Europe. Aujourd'hui, aucun de ces pays ne compte de ministres écolos.
Chronique sur RFI : Les Verts en Europe
C'est l'une des principales conséquences, du moins au plan politique, du remaniement décidé par François Hollande : les Verts quittent le gouvernement. Après le départ de Cécile Duflot et Pascal Canfin, le parti écologiste boude.
Dans un communiqué publié mardi 1er avril, Europe Écologie Les Verts (EELV) annonce la couleur:
La non remise en cause des orientations budgétaires ne nous semble pas de nature à permettre (la) transition énergétique de grande ampleur que nous appelons de nos voeux. Malgré les propositions faites par Manuel Valls, les conditions en l’état ne sont pas réunies pour qu’Europe Ecologie Les Verts participe au gouvernement."
Et de laisser toutefois la porte entrouverte en voulant être "des partenaires vigilants (du gouvernement) et présents pour que cette transition s’incarne dans des mesures d’ampleur". La défection écolo aura au moins fait une heureuse: Ségolène Royal, nommée ministre de l'écologie, 22 ans après avoir piloté un ministère de l'environnement sous Bérégovoy.
Le départ des deux ministres écolos du gouvernement, Pascal Canfin et Cécile Duflot, ainsi que la prise de distance à l'encontre du premier ministre n'ont pas fait l'unanimité au sein du parti. D'aucuns, à l'image du bouillonnant Daniel Cohn-Bendit, évoquent même "une faute politique":
Il fallait y aller [au gouvernement]. Et si ça ne marche pas, on peut en sortir. Mais [les Verts] devaient prendre leurs responsabilités. Pour les écologistes, la transition énergétique, c’est la chose la plus importante".
Pour les détracteurs de Cécile Duflot et de la stratégie d'indépendance vis-à-vis du nouveau gouvernement, ce refus de principe est contreproductif au regard des objectifs du parti, et représente une chance manquée pour les Verts de peser à un moment où l'éxécutif, François Hollande au premier chef, semble pour une fois sensible à la priorité environnementale.
Cet épisode illustre aussi l'épineuse et structurelle question du positionnement et de la pénétration des Verts au sein de la vie politique française. Les écologistes conservent l'image d'un parti de second plan, très souvent divisé. Un image qui tranche avec celles de certains de ses voisins européens, comme les Verts allemands, particulièrement bien installés dans le paysage politique.
Allemagne : les Verts qui pèsent
A peine créé, en 1980 dans ce qui était alors la RFA, le parti écologiste allemand Die Grünen s’est implanté très tôt dans la vie politique du pays en obtenant ses premiers élus au Bundestag en 1983. Devenu l’Alliance 90/les Verts en 1993, après avoir fusionné avec un mouvement d'opposition de l'ex-Allemagne de l'Est, ils participent à deux reprises, en 1998 et 2002, à une coalition gouvernementale dirigée par le chancelier Gerhard Schröder.
Joschka Fischer, ministre des affaires étrangères et vice-chancelier, en est la figure principale. Depuis, les Verts sont dans l’opposition et ont refusé l’an dernier de participer à une coalition avec la formation chrétienne démocrate d’Angela Merkel. Toutefois, ils restent très présents au niveau régional. Représentés dans les 17 parlements locaux, ils dirigent 7 Länder dans le cadre de coalition avec les sociaux démocrates mais aussi, depuis l’automne 2013, avec la CDU dans le land de Hesse: du jamais vu.
De fait, les Verts ne parlent plus seulement d’écologie, même si cela reste leur principal cheval de bataille. Sous Schröder, ils ont notamment œuvré pour la fin du droit du sang en matière de nationalité allemande et militent aujourd’hui pour le mariage gay, la fin des ventes d’armes allemandes ou pour davantage d’aide aux mères voulant travailler. Preuve de leur influence, en 2011, après l’accident de Fukushima, ils ont vu leur principal thème de campagne -l’abandon du nucléaire- récupéré par Angela Merkel.
Autriche, Bénélux: les Verts qui comptent
Dans l'Autriche voisine, les Verts sont un parti qui compte puisqu'ils disposent de 20 députés et recueillent plus de 10% des voix. Pourtant, ils n'ont jamais participé à un gouvernement, même s'ils ont failli le faire au milieu des années 2000. Egalement toujours dans l'opposition, la "gauche verte" néerlandaise se caractérise par une écologie politique militante. Aux dernières élections générales, le parti a atteint néanmoins un score de 6,7% et compte dix députés (sur 150).
Espagne : les Verts anecdotiques
Lorsque l’on parle des écolos en Espagne, le plus probable est que ce soit une référence au milieu associatif ou aux personnes qui recyclent leurs déchets. En effet, même si deux partis politiques écologistes subsistent, leur place sur l’échiquier politique national relève de l’anecdote.
Le premier, EQUO, est un tout jeune parti écologiste créé en 2011. N’ayant même pas recueilli 1% des voix aux dernières élections législatives, il ne compte, comme élus, qu’une vingtaine de conseillers municipaux dans tout le pays.
Le parti catalan Iniciativa per Catalunya Verds occupe une place plus importante aux parlements local et national, grâce à ses alliances avec divers partis de gauche. Au Parlement de Catalogne surtout, où 10 députés y siègent dans coalition avec Esquerra Unida, puis au Congrès à Madrid avec 2 sièges (sur 350) ou encore au Parlement européen avec un député issu de leur pacte avec La Izquierda.
Quant à son influence dans les débats et décisions politiques, il va de soit que l’écologie est le cadet des soucis des dirigeants espagnols. Avec la crise actuelle, il paraît évident qu’elle ne risque pas d’obtenir plus de crédit dans les années à venir.
Hongrie : les Verts vifs
Jusqu’à récemment, l’écologie politique n’avait guère pris racine dans la jeune démocratie de Hongrie. Toutefois, en février 2009, l'arrivée d'un nouvel acteur a changé la donne. "Une Autre Politique est possible" (LMP en hongrois), parti écologiste, de gauche, se lance alors dans les élections européennes, et récolte 2,8% des voix.
Un an plus tard, le LMP fait son entrée inattendue au parlement hongrois avec plus de 7% des suffrages, soit 16 députés. C’est le seul parti en Hongrie a avoir fait le choix d’une parité stricte et de la diversité (une de ses députées était d’origine rom). Preuve que le parti n'est pas là pour faire banquette, le leader du parti et chef de file du LMP au parlement hongrois, András Schiffer, y est le recordman de la prise de parole lors des débats.
Sur le terrain, le parti a manifesté son opposition à l’agrandissement de la centrale nucléaire de Paks et a surveillé de près les conséquences de la catastrophe des boues rouges d’octobre 2010. Parti de la troisième voie, LMP a aussi mené campagne contre la corruption dénonçant notamment les contrats pour des terres accordées à des proches du Fidesz.
Jeune parti trublion, le LMP n'a pas hésité à se joindre aux manifestations qui ont émaillé le mandat de Viktor Orbán, ou à donner dans des actions coups de poings y compris au parlement. Opposé au compromis, le parti s’est scindé en deux en 2013, et s'est affaibli: 8 députés ont décidé de former une plus grande coalition anti-Orbán en vue des élections législatives. LMP dispose de 3 conseillers municipaux à la mairie de Budapest (10% aux élections de 2010). Vraie bouffée d’air dans le paysage politique hongrois, provocateur de débat, le LMP souffre toutefois de l'autoritarisme de son chef et se heurte à l’écrasante majorité des 2/3 détenue par le tandem Fidesz-KDNP.
Grèce : les Verts frappés par la crise
La prise de conscience écologiste est récente en Grèce. Pendant longtemps n'existaient que quelques mouvements citoyens nés pour contrer des actions locales prédatrices. C’est en 2002, suite à la pression d'une puissante association de Thessalonique, que se tient un Forum écologique national débouchant sur la création d'un parti, les "Écologistes verts".
Ce jeune parti, membre de l'Alliance Libre Européenne au Parlement européen, promeut le développement durable, la protection des écosystèmes naturels et la qualité de vie, mais aussi la justice sociale, la démocratie directe et participative ou encore la décentralisation.
Respectueux de la diversité, c’est aussi le seul parti politique, dans une Grèce centralisée et nationaliste, à prendre la défense des minorités et des langues minoritaires et régionales. Sa déclaration fondatrice résume ses ambitions:
Créatif, radical, indépendant, tolérant, internationaliste, pacifiste, mobile, autonome, participatif, féministe, inclusif, anti-consommateur, alternatif et antiautoritaire".
Les Verts grecs n’ont pas de représentant au parlement national. Aux législatives de mai 2012, ils avaient obtenu 2,93% (185.366 voix), ratant leur entrée à l’assemblée nationale de quelques voix (environ 4.357 votes pour atteindre les 3%). Ils comptent cependant 440 conseillers municipaux (sur 12.978) et 13 délégués régionaux (sur 440). Aux européennes de 2009, ils obtiennent un siège de député.
Les écologistes verts ne sont alliés à aucun parti et n’ont participé à aucun gouvernement. La grave crise économique et sociale a stoppé la progression de ses idées, aussi entravée par des dissensions internes, à l'image de la récente démission du seul député européen.