Pas d'OGM en France. Le Conseil d'Etat et le Sénat viennent de clarifier un peu plus la position de la France dans ce débat. Et ce même si l'Europe dit oui et si les OGM sont déjà dans nos assiettes.
C'est un non radical. Le Conseil d'Etat vient de débouter la requête de deux producteurs de maïs transgénique. Une décision suivie quelques heures plus tard d'une interdiction, en provenance du Sénat, de cultiver en France des OGM MON810. L'Assemblée nationale avait déjà voté contre la culture du MON810 le mois dernier. Cette nouvelle décision fait le bonheur des anti-OGM, soulagés de cette prise de conscience du pouvoir politique en place comme on peut le voir sur Facebook :
Les deux producteurs agricoles, issus du Sud-Ouest de la France, avaient fait part de leur vif intérêt pour le MON810 censé résister à certains insectes dévastateurs pour les plantations comme la pyrale. Certains ont même profité de l'annulation du moratoire sur les cultures des semences made in Monsanto l'été dernier pour semer quelques hectares de maïs transgénique. Le 2 mai dernier, des militants de Greenpeace et des faucheurs volontaires de la Confédération paysanne se sont fait justice en arrachant ces fameux plans de MON810 comme on peut le voir sur Twitter :
ACTION: Nous demandons au gouvernement de neutraliser ce champ et de protéger les citoyens de la menace #OGM pic.twitter.com/yxZTcy2AOj
— Greenpeace France (@greenpeacefr) 2 Mai 2014
ACTION: du maïs #OGM MON810 a été planté en France ! Nous sommes sur place pour dénoncer cette culture ! pic.twitter.com/CldcRFahbx
— Greenpeace France (@greenpeacefr) 2 Mai 2014
Ces plans avaient été semés quelques jours avant la mise en application de l'arrêté interdisant la culture du maïs transgénique par le ministère de l'Agriculture le 14 mars dernier.
L'Europe transgénique
L'Union européenne (UE) avait, elle, autorisé le maïs OGM de Monsanto MON 810. Plus récemment, en février dernier, un second type de maïs transgénique, le TC1507 du groupe américain Pioneer, filiale de la multinationale DuPont, a également été autorisé par l'UE. Le refus de 19 pays dont la France n'y a rien changé. L'abstention des pays comme l'Allemagne, la Belgique, le Portugal ou encore la République tchèque lors du vote a pesé lourd dans la balance. Le "oui" à ce nouvel OGM, porté par des pays comme le Royaume-Uni, l'Espagne ou la Suède, l'a emporté à 260 voix contre 210 voix.
On retrouve le traditionnel clivage entre les pays anti et pro-OGM. La France, la Hongrie, le Luxembourg, la Grèce, l’Allemagne, l’Autriche et la Bulgarie, rejoints par la Pologne en avril dernier, ont décrété un moratoire. Selon l’organisation suisse Stop OGM, quelque 260 régions et plus de 4500 communes en Europe se sont aussi autoproclamées "sans OGM".
A l’opposé, l’Espagne, championne européenne, cultive 116.000 hectares de maïs OGM. D’autres pays autorisent également la culture de maïs OGM. Le Portugal cultive 930 hectares, la République tchèque 3000 hectares, la Roumanie 217 hectares et la Slovaquie seulement 189 hectares.
Derrière ces chiffres planent cependant des zones d’ombre. En Allemagne, les autorités avaient ordonné en 2007 l'arrachage de plants de colza OGM non-autorisés dans l’Union européenne et de colza traditionnel contaminé poussant à proximité.
Manque de transparence
Reste que si les surfaces concernées par les OGM sont réduites, de nombreux doutes subsistent également sur la présence de ces variétés dans les assiettes… De nombreuses sortes d’OGM peuvent, en effet, être importées à des fins alimentaires dans l’Union européenne (soja, maïs, colza et dans une moindre mesure pomme de terre et betterave), provenant essentiellement des Etats-Unis, d’Argentine, du Brésil ou de Chine où la culture de plantes OGM est autorisée et pratiquée à grande échelle.
Destinés à l’alimentation animale – 80% des 4, 5 millions de tonnes de soja importées chaque année du Brésil pour nourrir les porcs et volailles sont d'origine transgénique, selon Greenpeace – ou à la fabrication d’ingrédients pour l’industrie agroalimentaire, les OGM ne peuvent pas toujours être décelés par les consommateurs en dépit de la réglementation : depuis 2004, Bruxelles oblige les fabricants de produits alimentaires contenant plus de 0,9% d’ingrédients génétiquement modifiés à les signaler par une étiquette.
Mais l’affaire se complique avec les produits issus d’animaux nourris avec de l’alimentation OGM. Les viandes et les aliments provenant d’animaux, comme les œufs ou le lait, et leurs dérivés (yaourts, biscuits…) ne sont soumis à aucune obligation d’étiquetage même si, depuis le 1er juillet, les producteurs peuvent, en France, bénéficier du label "nourris sans OGM".
Avant la France, l’Allemagne, l’Autriche et l’Italie pratiquaient déjà cet étiquetage spécifique. De quoi rassurer les consommateurs inquiets. Selon un sondage Eurobaromètre en 2010, publié par la Comission européenne, 59% des sondés jugent que les OGM ne sont pas sans danger pour leur famille et 58% qu'ils ne sont pas sûrs pour les générations futures.
Article publié le 18/02/14 mis à jour le 06/05/14