L’Allemagne comme la France sélectionne ses réfugiés
L'Allemagne, destination favorite des réfugiés. Cette année encore le nombre de demandes d'asile a augmenté de 61% outre-Rhin. Mais le gouvernement allemand, inspiré par celui de Manuel Valls, veut freiner cette "invasion".
L’Allemagne fait rêver. Tellement que depuis 2013, le pays est devenu l'Etat plébiscité par les demandeurs d'asile selon l'Agence des nations unies pour les réfugiés (UNHCR) (voir graphique ci-dessous). Une tendance confirmée par les chiffres du ministère de l'Intérieur. Le nombre de demandes d'asile a augmenté de 61% en 2013. A la fin du mois de mai 2014, 62.600 personnes avaient fait une demande d'asile vers l'Allemagne. C'est près de 23.800 requêtes de plus que l'année précédente.
Parmi ces nouveaux réfugiés on compte surtout :
- Des Syriens, 10.000 demandes depuis le début de l'année contre 4000 sur la même période en 2013.
- Des Serbes, 7800 demandes depuis le début de l'année contre 4400 sur la même période en 2013.
- Des Afghans, 3860 demandes depuis le début de l'année contre 1000 sur la même période en 2013.
Viennent ensuite, dans une moindre mesure, les Albanais et les Macédoniens.
Mais si les demandes sont pléthore, le taux d'acceptation reste extrêmement faible. Seulement 18% des requêtes sont validées en Allemagne pour 109.600 demandes, 10% en France pour 60.100 demandes et 9% en Suède pour 54.300 demandes (voir rapport ci-dessous). N'en déplaisent aux populistes, l'Europe est encore très loin d'accueillir toute la misère du monde…
Malgré tout, l'Allemagne est décidée à lutter activement contre "l’invasion" des réfugiés politiques sur son sol. Pour ce faire, le ministre de l'Intérieur allemand, Thomas de Maizière, s'est inspiré d'une bonne vieille stratégie française. Donner le statut "d'Etat sûr" aux pays d'où viennent un grand nombre de candidats à l'asile. Il est évidemment beaucoup plus facile de refuser l'asile à un demandeur venant d'un pays dit "sûr".
Ainsi, depuis peu, la Macédoine, la Serbie et la Bosnie-Herzégovine sont reconnus par Berlin comme des pays qui
veillent au respect des principes de liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales."
La France "visionnaire"
La France classe et déclasse ainsi régulièrement de nombreux pays dans la catégorie "sûrs" ou "pas sûrs" afin de gérer, et sutout de freiner, l'arrivée des réfugiés politiques.
L'Office français de protection des réfugiés (OFPRA) publie d'ailleurs une liste de ces Etats où "les droits de l'homme" et les "libertés fondamentales" sont censées être respectées. Parmi les pays, on retrouve la Georgie et ce même si en 2012, une vidéo circulait sur le net montrant le passage à tabac et le viol de plusieurs détenus dans une prison de Tbilissi sans que le gouvernement géorgien ne s'en inquiète. Où encore la Serbie qui a tout de même interdit, le 10 décembre 2012, toujours selon Amnesty international, un défilé commémorant la Journée internationale des droits de l'homme…
Depuis plusieurs années, Amnesty lutte pour interdire la notion "d'Etats sûr" en France :
Les ressortissants de pays considérés comme "sûrs" ne bénéficient que d’une procédure accélérée en 15 jours devant l’OFPRA. En cas de rejet de leur demande par cet établissement sous tutelle du ministère de l’Intérieur, ils peuvent être renvoyés dans leur pays avant même que la Cour nationale du droit d’asile n’ait rendu une décision définitive sur leur cas."
Même la condamnation, le 2 février 2012, par la Cour européenne des droits de l'homme pour refus de recours pour les réfugiés n'a pas fait bouger d'un pouce l'ex-gouvernement Fillon, pas plus que ceux de Jean-Marc Ayrault et Manuel Valls.
L'économie justifie tout
Le ministre de l'Intérieur allemand met en avant l'argument économique. Toutes personnes présentant une première demande d'asile outre-Rhin a automatiquement droit à un logement, l'accès aux prestations médicales et reçoit 134 euros tous les mois pour un adulte et 80 euros pour un enfant, le temps que sa demande soit traitée.
Mais peut-on vraiment parler de gabegie financière ? La majorité des demandes d'asile viennent de Russie. Car si l'on dénombre 14.853 requêtes serbes et kosovardes (l'UNHCR ne fait pas la distinction entre les deux pays pour le nombre de demandes) la Russie, à elle seule, compte 14.887 demandeurs d'asile vers l'Allemagne. Viennent ensuite les Syriens (11.851 demandes) et les Afghans (7.735 demandes) comme on peut le voir dans le tableau ci-dessous :
Quant aux autre pays des Balkans concernés, la Macédoine et la Bosnie-Herzégovine, ils ne représentent qu'une part infime des demandeurs d'asile en Allemagne. Leurs requêtes sont rarement acceptées. Comme le rapporte le ZeitOnline, en 2013, seuls 142 demandes en provenance de ressortissants des pays balkaniques ont été validées.