Nos poubelles valent de l'or. La Commission a décidé de développer le recyclage et a fixé l'objectif de zéro déchet non recyclés. Un objectif ambitieux sur le papier mais non contraignant pour les Etats. Un premier pas insuffisant, estiment les organisations écologistes.
Chronique sur RFI - Le recyclage des déchets
Un septième continent apparaît en plein milieu de l’océan Pacifique. Un continent constitué uniquement… de matières plastiques. "Le plastique, serial killer des océans" titre ainsi cette semaine l'hebdo "Le 1".
Consciente que les déchets, notamment ces plastiques, engendrent des dégâts à long terme sont un problème majeur pour la planète, mais aussi que la protection de l'environnement peut redonner de la compétitivité à l’Europe, la Commission européenne a adopté le programme “Vers une économie circulaire : programme zéro déchet pour l’Europe.” Comme le note Janez Potocnik, le commisaire européen à l’environnement, c’est un programme essentiel car il reconnaît que
le modèle de croissance que nous suivons n’est pas le bon pour l’Europe du XXIe siècle.”
L’idée ? Développer l’économie circulaire dans l’Union européenne. À l’opposé du modèle économique linéaire actuel – prélever, produire, consommer, jeter – l’économie circulaire consiste à faire des déchets des uns les matières premières des autres, pour ensuite rentrer dans un nouveau cycle de production. Nos poubelles valent de l’or et “la priorité doit être le recyclage” insiste Potocnik. Le commissaire fixe comme objectif le recyclage de 70 % des déchets municipaux, 80 % des déchets d’emballages et 60 % des déchets plastiques d’ici 2030.
Concrètement, le programme présenté par Janez Potocnik prévoit, notamment, la révision de la directive de 2008 sur les déchets et de celle sur l’usage des sac plastiques. Mais, cette fois encore, au delà des bonnes intentions affichées, les objectifs ne sont pas contraignants. Ce sont tout au plus des pistes pour augmenter les capacités de recyclage et supprimer la mise en décharge. Le commissaire européen estime que 580 000 nouveaux emplois pourraient ainsi être créés d'ici 2030 pour atteindre ces objectifs.
De grandes disparités en Europe
Chaque année les Européens produisent 2 milliards de tonnes de déchets. Bien que le recyclage et le compostage rentrent de plus en plus dans leurs usages, les modes de traitement ne sont pas les mêmes d’un bout à l’autre de l’Union. Ainsi, alors qu’en Bulgarie 73 % des déchets produits étaient mis en décharge en 2012, les Pays-Bas n’en jettaient que 1 % et en incinéraient 49 %. La France n'est pas particulièrement exemplaire avec 39 % seulement de déchets recyclés et 28 % mis en décharge.
Mais elle n'est pas la seule. Loin des objectifs fixés par Janez Potocnik, cette mise en décharge reste un moyen très prisé des Européens pour se débarrasser de leurs déchets. Elle concerne encore le tiers des déchets retraités en Europe. Sur les 28 États, 15 mettent encore majoritairement leurs déchets en décharge tandis que seulement quatre favorisent en majorité le recyclage ou le compostage.
Un pas en avant… encore insuffisant
Les organisations environnementales saluent, certes, globalement un pas en avant intéressant qui va dans le sens de la disparition du gaspillage. Néanmoins elles jugent que ces décisions ne vont pas assez loin. Parmi elles, le bureau européen de l’Environnement déplore le manque de mesures qui limiteraient le recours à l’incinération comme une alternative à la mise en décharge.
De l’autre côté, les entreprises proposent déjà des projets allant dans le sens du recyclage. En Allemagne, Puma a lancé en 2012 l’opération “Bring me back”. Des conteneurs placés dans les magasins de l’enseigne permettent aux clients de déposer les vêtements de n’importe quelle marque qu’ils n’utilisent plus. Ils entrent ensuite dans la création d’une nouvelle ligne de vêtements recyclés. Autre exemple, Ikea qui a créé en 2010 un site Internet sur lequel les clients peuvent vendre leurs meubles Ikea usagés.
Néanmoins, les chefs d’entreprises soulignent le manque de moyens techniques pour atteindre de telles capacités de production grâce au recyclage. Antoine Frérot, PDG de Véolia, explique dans Challenge que “le tri aujourd’hui est encore très coûteux, car encore trop manuel”. Un frein au développement du recyclage même si les technologies évoluent et automatisent de plus en plus cette activité. Le deuxième argument mis en avant est technologique. Les matières premières ne sont pas toutes recyclables et certaines nécessitent des investissements plus importants que les gains espérés par le recyclage. Des technologies à développer d’ici 2030, date fixée par la Commission pour la réalisation de son objectif zéro déchet.