L'auteur présumé des fusillades de Copenhague sortait de prison. Cela pose une nouvelle fois la question du risque de radicalisation en prison et des conditions de détention.
Chronique sur RFI - Les prisons
Les services de renseignement danois (PET) estiment qu’Omar El-Hussein, l'auteur présumé des fusillades de Copenhague s’est radicalisé en prison. Cependant "les éléments du rapport ne portaient pas à croire qu'(il) planifiait une attaque", expliquent les services de renseignement danois cités par l’AFP.
Des témoignages d'anciens amis du suspect dans le quartier populaire, où l'auteur présumé des attaques a été abattu par la police dimanche dernier, ont étayé cette hypothèse d'une radicalisation en prison. Selon ces proches cités par le quotidien Berlingske, il s'était laissé pousser la barbe, ne discutait plus des villes et des voitures, mais de l’Islam, de Gaza et de l’accession au paradis.
Omar El-Hussein avait été arrêté en janvier 2013 après avoir poignardé un jeune homme dans un train de banlieue. Danois d'origine palestinienne, il avait été placé en détention préventive dans l'attente de sa condamnation à deux ans de prison en décembre dernier. Mais il avait bénéficié il y a deux semaines d’une remise en liberté anticipée ayant déjà effectué la moitié de sa peine.
L’échec du modèle danois
Le fait d’avoir été mis en détention prouve qu’il avait été considéré comme dangereux dans un pays où l’on essaye généralement d'éviter d'envoyer en prison les petits délinquants, notamment pour réduire notamment le risque de contagion au radicalisme religieux. De plus les personnes incarcérées suivent un "parcours de réhabilitation". Mais pour Omar El-Hussein, personne n'a détecté son endoctrinement et son fanatisme religieux, ni surveillé ses relations au sein de sa prison. Un échec cinglant.
Pourtant le Danemark fait partie des pays européens qui mobilisent d'importants moyens financiers pour leurs populations incarcérées en dépensant 186 euros par jour et par détenu. C'est cependant moins que la Suède qui dépense 317 euros, la Norvège 283 euros, les Pays-Bas 273 euros.
Si ces pays dépensent autant pour leurs prisons c’est parce qu’ils estiment que la détention n’est pas une fin en soi. Et pour cela, ils s’en donnent les moyens en finançant notamment des programmes de réintégration dans la société.
Les prisons au pain sec avec la crise
Cela explique qu’ils dépensent nettement plus que la France qui est dans la moyenne européenne avec seulement 97 euros, soit plus que l'Espagne qui ne consacre que 66 euros à ses détenus. Mais c'est moins que l'Italie avec 128 euros et l'Allemagne avec 116 euros.
Des budgets pour les prisons et les prisonniers qui ont, dans l'ensemble, diminué ces dernières années avec la crise économique, s'alarme le Conseil de l'Europe dans un récent rapport sur question. Il souligne, ce qui n'est pas surprenant, que les Etats qui ont le plus réduit leurs dépenses sont aussi ceux qui ont été les plus touchés par la crise. Pourtant le nombre de prisonniers en Europe (1,7 millions) est relativement stable depuis quelques années.
La Suède ferme ses prisons
Il y a même un pays, la Suède, qui vide et ferme ses prisons. Lentement mais sûrement. Depuis 2004, le nombre de prisonniers diminue de près d'1% tous les ans. Résultat: 4 établissement pénitentiaire ont, ou vont mettre, la clé sous la porte.
C’est la conséquence de la généralisation des peines de probations. Alternative à la prison, elles sont systématiques pour les délits considérés comme relativement mineurs, comme, par exemple, la détention de drogue.
Le condamné purge sa peine en liberté, encadré par un tuteur de probation et participe à des travaux d'intérêts généraux et autres programmes d'aides afin de prouver qu'il peut, et qu'il veut, se réinsérer dans la société.
Quant aux 13 000 détenus, 5000 seulement purgent leur peine dans une prison fermée. Les autres sont détenus dans des bâtiments ouverts sans miradors ou barreaux aux fenêtres. Chaque prisonnier possède une cellule individuelle et les normes d'hygiènes sont strictement respectées. Les "résidents" de ces prisons travaillent. Ils débutent leur journée à 8h pour la finir à 16h pour un salaire de 40 euros par semaine.
Et ce n'est pas pour autant que le nombre de crimes, de vols et d'agressions, a augmenté. N’en déplaise aux détracteurs de Christiane Taubira pour qui la politique carcérale suédoise a valeur d’exemple.
Cela permettrait de réduire la surpopulation carcérale propice à tous les fanatismes. Mais, même dans les pays septentrionaux la Suède a une longueur d’avance. En Norvège, par exemple, les prisons sont pleines et Oslo a demandé à Stockholm s’il pouvait lui envoyer ses détenus en surnombre.