Après sa prestation télévisée du 14 avril, le président français chute encore dans les sondages. Sa communication est manifestement inadaptée car, malgré des difficultés, ses homologues italien et allemand font bien meilleure figure.
Jeudi dernier sur France 2, François Hollande a tenté de redresser son indice de popularité à un an de la présidentielle en participant à l’émission « dialogue citoyen ». Confronté notamment à un panel restreint de Français, il n’a, de l’avis général, guère convaincu et les derniers sondages le placent encore plus bas qu’avant l’émission.
L’ampleur de ce rejet sans précédent invite à s’interroger sur la validité de la stratégie de communication d’un président de la République revenu à ses plus bas niveaux de défiance enregistrés à la fin 2014, avant les attentats de janvier 2015.
Selon l’enquête Ifop-Journal du dimanche, la côte de popularité de François Hollande s’établissait à 15% avant l’émission de France 2 et elle est tombée à 12% après. L’enquête TNS-Sofrès lui accorde par ailleurs 13% d’intentions de vote au premier tour de la présidentielle s’il est face à Alain Juppé. Selon cet institut, la cote du précédent président Nicolas Sarkozy n’est jamais tombée sous les 20% et celle de Jacques Chirac a connu un plus bas de 16% en juillet 2006. On se situe là à des niveaux d’impopularité historique pour un chef de l’Etat.
Mariano Rajoy dans une (moins) mauvaise passe
Un niveau également sans équivalent en Europe. Même si, actuellement, chez deux de nos grands voisins, les chefs de gouvernements sont en difficulté. A commencer bien sûr par Mariano Rajoy, président du gouvernement espagnol qui « gère les affaires courantes » depuis décembre dernier puisqu’aucun gouvernement n’a pu être constitué à l’issue des dernières élections législatives.
Malgré son souhait, Mariano Rajoy n’est toujours pas parvenu à former avec les socialistes un gouvernement de « grande coalition » à l’allemande et il y a tout lieu désormais de penser que, début mai, de nouvelles élections générales seront annoncées pour le mois de juin. Dans ce contexte, sa popularité est évidemment au plus bas : 80% des Espagnols estiment que « son temps est passé » et ne souhaitent pas qu’il conduise de nouveau le Parti populaire à l’occasion du prochain scrutin.
Il pleut sur David Cameron
Le printemps est également bien pluvieux pour David Cameron qui vient de lancer une campagne extrêmement difficile en faveur du maintien du Royaume Uni dans l’Union européenne. Il lui reste 65 jours avant le référendum de juin pour convaincre une opinion très indécise de refuser le fameux « Brexit »
En outre, le premier ministre britannique est gravement affaibli après avoir reconnu qu’il avait détenu des comptes off shore avant 2010. Avant cette révélation issue des « Panama Papers », son taux d’approbation était de 34%. Ces derniers jours, un sondage du « Times » le place à seulement 21% de taux d’approbation contre 28% à son adversaire travailliste Jeremy Corbyn.
Matteo Renzi résiste, Merkel se rétablit
En revanche, malgré la démission récente d’une de ses ministres soupçonnée de trafic d’influence, le président du conseil italien réussit quand même à conserver 40% de confiance personnelle même si son parti démocrate est tombé à 30%.
Autre belle faculté de résilience, celle d’Angela Merkel. La popularité de la chancelière a été mise à mal ces derniers mois du fait de sa politique migratoire jugée beaucoup trop laxiste par son électorat. En février, sa popularité était tombée à un plus bas niveau de 4 ans – à 46% tout de même ! Mais elle est remontée en mars à 54%.
Une question d’image au delà des résultats
Le succès où l’échec des politiques menées est bien sûr un facteur déterminant à long terme la popularité d’un dirigeant. Mais la stratégie de communication n’est pas loin d’être tout aussi essentielle, notamment à court-terme. De fait, il est toujours difficile de porter un jugement objectif sur des politiques qui mettent longtemps à produire des effets tangibles. C’est donc la manière dont l’opinion ressent le succès ou la validité d’une politique qui détermine de prime abord l’approbation ou la désaffection des citoyens.
Depuis longtemps soupçonné de mener une politique louvoyante en contradiction avec ses promesses électorales, François Hollande a ainsi commis jeudi dernier une lourde erreur de communication si l’on en croit l’analyse faite dans la Tribune.fr par le communiquant Florian Silniki. Selon ce dernier, il a suscité la colère des réseaux sociaux en affirmant que tout allait mieux en France, apparaissant ainsi comme un froid statisticien des chiffres ne tenant aucun compte du malaise profond de la population.
C’est tout le contraire d’Angela Merkel, qui apparaît comme une femme de conviction sensible aux malheurs des gens, même lorsque sa politique migratoire est jugée aventureuse par son électorat. Quant à Matteo Renzi, il colle obstinément à son image de « Rottamatore », littéralement, le « démonteur », celui qui casse les rigidités, les tabous, les vieux compromis politiciens.
L’art de parler aux réseaux sociaux
Et Renzi a misé à fond sur les réseaux sociaux pour entretenir cette image. Il converse régulièrement avec les Italiens via Facebook et Twitter à l’occasion de son programme « Matteo Risponde ». Il compte d’ailleurs 2,3 millions d’abonnés à son compte Twitter contre environ 1,5 millions pour David Cameron et François Hollande.
En outre, le président français ne met en œuvre sur twitter qu’une communication « top-down » (du haut vers le bas) et se contente d’exprimer son auto-satisfaction, ou des félicitations ou encore beaucoup de message de condoléances. On est vraiment dans un ancien monde convenu.
Certes, Angela Merkel a choisi de ne pas avoir de compte Twitter personnel. Elle est en revanche, très active dans sa communication « Facebook » ou elle engrange près de deux milllions de « like » contre 850.000 à François Hollande. Et son site personnel, d’un « design » très réussi donne à faire voir la femme et surtout la « Mutti » – la maman – à qui les Allemands font confiance.
La « Mutti » contre le « normal »
Des images qui suscitent l’adhésion pour une personnalité et qui préservent le leader en cas d’erreur ou d’insuccès. En France, François Hollande s’était « vendu » en 2012 comme le président « normal » en contre-référence à Nicolas Sarkozy. Mais quatre ans après, l’opinion française a du mal à se satisfaire d’un président « normal » qui ne réussit pas ou qui réussit mal. Pire, si le président est « normal », il est comme tous les Français, ce qui donne à penser que tous les Français échouent…!