L'ancien chancelier allemand, décédé vendredi 16 juin à 87 ans, restera dans les mémoires comme l'homme de la réunification allemande et de la construction européenne.
Il était, de la bouche du président de la Commission, Jean-Claude Juncker, l’ « incarnation même de l’Europe ». Preuve que l’Union européenne (UE) lui doit beaucoup : le Vieux Continent prépare une cérémonie en sa mémoire. Une première dans l’histoire, pour honorer l’un des trois hommes politiques, avec Jean Monnet et Jacques Delors, à s’être vu décerner le titre de citoyen d’honneur de l’Europe.
Si l’on devait résumer en quelques mots le parcours politique d’Helmut Kohl, il faudrait employer un oxymore des temps passés : l’ancien chancelier allemand (1982-1998) a su réunifier l’Allemagne tout en construisant l’Europe. La chose, c’est peu de le dire, n’avait rien d’évident à l’époque. Beaucoup craignaient en effet que la réunification n’entraine la résurgence d’un sentiment nationaliste, totalement à contre-courant de la « fabrication » de l’Europe.
« Allemand européen » et « Européen allemand »
Il n’en fut rien, donc. Européen convaincu, Helmut Kohl est même considéré comme l’une des Pères fondateurs de la monnaie unique. En 1986, il signe avec François Mitterrand, alors président de la République française, et Jacques Delors, président de la Commission européenne, l’Acte unique européen, qui pose les jalons d’une véritable cohésion économique et sociale. Puis, en 1992, oeuvre pour la signature du traité de Maastricht, qui lance l’Union économique et monétaire (UEM), véritable point de départ de l’euro, qui entrera en vigueur quelques années plus tard.
L’abandon du Deutsch Mark par les Allemands, qui y étaient très attachés – comme élément constitutif de leur souveraineté – fut à ce propos un symbole très fort de la construction européenne. Beaucoup s’accordent à dire que n’importe quel chancelier aurait réussi à réunifier l’Allemagne. Mais Helmut Kohl était le seul à pouvoir lancer la monnaie unique, grâce à sa croyance inébranlable en l’Europe et à son caractère. Caractère qui, selon lui, était bien plus important que l’intelligence ou le savoir pour gouverner.
C’est sans doute grâce à ce même caractère que le chancelier allemand a pu faire autant pour la réconciliation franco-allemande, critère essentiel, entre autres, de la construction européenne. On se souvient de cette poignée de main, en 1984, avec François Mitterrand, devant le monument aux morts de Verdun. Lui qui n’a jamais entretenu la haine des Français, comme certains de ses compatriotes après la Seconde Guerre Mondiale, alors que l’armée française occupait le Bas-Rhin, a également travaillé pour faire progresser le débat sur la mémoire des crimes nazis.
Jean-Claude Juncker, pour qui « Helmut Kohl était un grand Européen et un très bon ami », a annoncé être en contact avec les autorités allemandes et la famille pour mettre en place la cérémonie d’hommage. Si aucune date n’est encore avancée, l’événement pourrait avoir lieu au Parlement européen, à Strasbourg. Selon le président de la Commission européenne, l’ex-chancelier d’Allemagne, autant « Allemand européen » qu' »Européen allemand », « mérite une cérémonie officielle européenne », pour laquelle il s’impliquera « personnellement ».