Dans la grande famille des énergies renouvelables, l’hydrolien est un membre méconnu, mais dont l’efficacité va le propulser sur le devant de la scène. La France est dotée du deuxième potentiel européen derrière la Grande-Bretagne et pourrait produire, à terme, entre 2 et 3 GM. La technologie est encore testée à des fins d’amélioration, mais les projets industriels commencent à émerger grâce à plusieurs entreprises en pointe dans ce domaine.
Des côtes françaises dessinées pour l’hydrolien
La ville de Cherbourg-en-Cotentin n’est pas peu fière. Son maire, Benoît Arrivé a posé la première pierre de la future usine d’assemblage d’hydroliennes le 21 juillet 2017. Ce complexe unique en son genre est né des besoins de l’entreprise OpenHydro dont le carnet de commandes augmente sensiblement chaque année. L’usine – qui est en fait déjà construite en partie – pourra livrer 50 turbines par an et emploiera une quarantaine de salariés.
Le lieu n’a pas été choisi au hasard, car non loin de là, se trouve le raz Blanchard. Une ferme pilote va bientôt y voir le jour et profiter ainsi des courants les plus forts d’Europe. Le projet porté par Naval Energies (maison-mère d’OpenHydro) et EDF Energies Nouvelles, prévoit la mise à l’eau de sept hydroliennes d’une puissance de 2 MW chacune, mais l’usine de Cherbourg a bien une visée internationale d’autant que les entreprises françaises souhaitent prendre une part importante du marché de l’hydrolien. Un marché mondial estimé à 200 milliards de dollars. La réussite d’un tel projet est donc primordiale pour en faire une vitrine à l’exportation.
La mise en service de cette ferme pouvant atteindre une puissance de 5,6 MW est prévue pour la fin de l’année et l’énergie produite sera raccordée au réseau électrique au moyen d’un câble unique. D’autres projets français sont encore plus avancés à l’image des deux hydroliennes immergées au large de Paimpol par EDF en janvier 2016 et qui pourront bientôt être reliées au réseau et fournir de l’électricité à 3 000 foyers. Enfin, la PME Sabella a réussi sa phase de test avec une hydrolienne installée dans le passage du Fromveur et pouvant produire 1 MW destiné à l’alimentation en électricité de l’île d’Ouessant.
De tels projets sont considérables et demandent des moyens importants et du temps. A titre d’exemple, le projet d’EDF d’hydroliennes au large de Paimpol a été initié dès 2008. Les études sont longues et les démarches administratives encore lourdes malgré les efforts des pouvoirs publics pour accélérer la mise en place des programmes. Les subventions publiques sont également nécessaires et par ailleurs autorisées par l’Union européenne comme cela a été confirmé en juillet 2016. Toutefois, malgré une mobilisation des entreprises et des pouvoirs publics, l’hydrolien constitue un défi technique et scientifique qui rend son développement encore lent.
Un défi à la hauteur des espoirs suscités
Les hydroliennes fonctionnent comme les éoliennes grâce à l’énergie cinétique. Dans le cas présent, c’est l’eau qui est utilisée pour produire un mouvement cinétique mécanique susceptible d’être transformé en électricité via un transformateur. L’intérêt des hydroliennes est double. A dimension égale, la puissance produite est beaucoup plus grande que par une éolienne car la masse volumique de l’eau est environ 800 plus grande que celle de l’air. De plus, les hydroliennes sont placées à des endroits où la force du courant est constante et connue. L’énergie n’est donc ni intermittente, ni imprévisible comme pour les éoliennes. Fort de ce double aspect, l’hydrolien peut compter sur un développement à l’échelle mondiale au cours des prochaines décennies. Pourtant, certains aspects sont à prendre en compte afin d’assurer un avenir particulièrement radieux à cette source d’énergie non polluante.
La première difficulté est, sans surprise, du domaine technique. Les matériaux développés pour fabriquer les éoliennes doivent être résistants à la corrosion et aux organismes qui peuvent encrouter (à l’usure) le mécanisme. Les coûts sont donc élevés il faut malgré tout utiliser des agents non naturels qui préviennent la saturation par des organismes naturels comme les algues. Une flore marine quelque peu dérangée et qui pourrait subir à terme des modifications notamment en raison de l’impact sonore des turbines. La flore pourrait se détourner des lieux où sont immergées les hydroliennes et changer en conséquence la vie de la faune.
Le recul pour bien appréhender ces phénomènes est encore trop faible et même si les modalisations sont très utiles, seule l’expérience sur le terrain peut apporter des réponses définitives. Les chercheurs restent mobilisés car l’hydrolien n’en est encore qu’à ses débuts et donc encore sujet à des modifications de taille pour le rendre encore plus performant et sans impact aucun sur le milieu naturel. La jeunesse de cette énergie est très prometteuse et la France a la chance d’avoir un potentiel exceptionnel que des entreprises nationales comptent bien exploiter afin de contribuer à une transition énergétique déjà bien lancée.