La cloche la plus célèbre d'Angleterre, et peut-être même du monde, sonnera ses derniers coups à midi, aujourd'hui, avant d'être mise sous silence pour des travaux censés durer quatre ans. Une décision bien plus politique qu'il n'y parait.
Big Ben, à midi pile, sonnera ses douze derniers coups avant de se taire pendant quatre ans. La cloche de 13,7 tonnes, véritable symbole de la capitale londonienne, au carillon si particulier, doit être rénovée et il est hors de question qu’elle continue de sonner toutes les heures pendant que les ouvriers seront dans les parages – le bruit des cloches a tout de même été mesuré à 118 décibels, le seuil de la douleur étant fixé à 120. Le chantier, d’un montant de 31,7 millions d’euros, a été validé par le Parlement, qui siège dans le palais de Westminster, en contrebas de la tour de 96 mètres de hauteur.
Comme à de très rares reprises depuis 1859, année de sa mise en service, Big Ben restera donc silencieuse – sauf pour célébrer la nouvelle année et les armistices. Une période de vacance dores et déjà très critiquée outre-Manche ; « il n’est pas raisonnable que Big Ben soit réduite au silence pendant quatre ans » s’est exprimée la Première ministre britannique, Theresa May, mercredi dernier. Cette dernière a même exigé des responsables au sein de la Chambre des Communes qu’ils revoient d’urgence le calendrier des travaux.
Luftwaffe
Les partisans du Brexit estiment de leur côté qu’il est inconcevable que la cloche se taise au moment de célébrer la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE). « Il serait très étrange si à minuit, ce jour-là, elle ne sonne pas. C’est le coeur de notre nation » a par exemple déclaré le député conservateur Peter Bone dans le « Daily Mail ». Face à cette fronde, le Parlement a annoncé que la durée des travaux, qui était inconnue lors du vote en 2015, serait réévaluée lors de la rentrée parlementaire en septembre.
Les partisans des travaux ne comprennent pas le foin qui est fait autour de la durée des travaux et la mise à l’arrêt de Big Ben. « Comment quelqu’un peut imaginer que les travaux peuvent se tenir sans arrêter la cloche ? » s’est exclamé Chris Bryant, député travailliste qui siège au sein du comité de rénovation du palais de Westminster. « Ce débat a donné lieu à un amas de contresens » a estimé quant à lui le député conservateur Conor Burns. « Mes collègues ont même été jusqu’à dire qu’en arrêtant Big Ben, la commission de rénovation est en train de faire ce que la Luftwaffe n’avait pas réussi à faire » a-t-il fait savoir également.
Les Britanniques, quant à eux, selon un sondage de l’institut YouGovm, sont plutôt favorables à la mise sous silence de Big Ben pour toute la durée des travaux… sauf occasions spéciales – le Nouvel An et les armistices, donc. Dans la classe politique, la réaction la plus mesurée et censée, sans doute, est venue du leader du parti travailliste, Jeremy Corbyn, qui a déclaré que ne pas entendre le carillon de la tour n’était pas un « désastre national ». Reste à savoir si Big Ben retentira pour célébrer le Brexit, dont les discussions sont déjà bien engagées entre Londres et Bruxelles, qui doit intervenir en mars 2019.