Si Angela Merkel a été réélue, hier, chancelière fédérale, son parti, la CDU-CSU, sort affaibli des législatives, qui consacrent l'arrivée au Bundestag de l'AfD, le parti de droit nationaliste créé en 2013. Les sociaux-démocrates de Martin Schulz ont enregistré quant à eux leur plus mauvais résultat et ne participeront pas à un nouveau gouvernement de coalition, contrairement, sans doute, aux libéraux du FDP et aux Verts.
Tous les voyants ou presque étaient au vert. Les chiffres de l’économie allemande – au moins en façade – sont bons ; l’opposition – notamment les sociaux-démocrates (SPD) – apparaissait morcelée ; seuls les sondages, qui la donnaient tout de même favorite, commençaient à bouger un peu ces derniers temps. Mais c’est en toute logique qu’Angela Merkel et son parti, les chrétiens-démocrates (CDU-CSU), ont remporté le scrutin d’hier et vu la chancelière sortante rempiler pour un quatrième mandat consécutif. Pourtant, la fête n’était pas de mise.
« Un jour amer pour la social-démocratie »
La CDU-CSU, avec seulement 32,5 à 33,5 % des voix, pourrait avoir battu le plus bas historique de Mme Merkel – elle avait fait 33,8 % en 2009. Si les conservateurs allemands ont remporté les élections législatives, le parti de la droite nationaliste Alternative pour l’Allemagne (AfD) a fait une entrée historique au Bundestag, où il obtient entre 86 et 89 sièges de députés. Alexander Gauland, co-tête de liste de ce mouvement ouvertement anti-islam et anti-migrants créé en 2013, a d’ailleurs annoncé que « nous allons changer ce pays » tout en promettant de mener « une chasse » contre la chancelière.
De leur côté, les sociaux-démocrates (SPD) emmenés par l’ancien président du Parlement européen, Martin Schulz, étaient certes promis à une défaite – mais pas de cette ampleur. Avec légèrement plus de 20 % des voix, ils font moins bien que les 26 % des précédentes élections en 2013 et semblent tirer une croix sur une nouvelle coalition. Pour certains observateurs, leurs électeurs ont en effet sanctionné hier leur participation à la « grande coalition » d’Angela Merkel ces quatre dernières années.
Martin Schulz, qui a estimé hier soir peu après l’annonce des premiers résultats que c’était « un jour amer pour la social-démocratie », commençait d’ailleurs à se faire désavouer jusque dans son propre camp. Depuis les années 2000, le SPD est de plus en plus concurrencé sur son flanc gauche, qui voit apparaitre des mouvements anti-libéraux, comme le Parti de Gauche, opposés au glissement libéral opéré par les sociaux-démocrates. Qui devraient en principe prendre le temps de tirer les conséquences de l’échec électoral d’hier.
« Nous sommes face à un nouveau grand défi »
Si coalition il devrait y avoir, c’est plutôt du côté des libéraux du FDP (10,5 %, 69 députés) et des Verts (9,3 %, 63 députés) qu’Angela Merkel devrait aller piocher. Pour Frédéric Lemaître, correspondant du Monde à Berlin entre 2010 et 2016, « si aucune coalition ne parvient à obtenir la majorité des voix, on peut théoriquement imaginer un gouvernement minoritaire ou de nouvelles élections. Mais la stabilité des institutions est une vertu cardinale pour les Allemands […] Jusqu’à présent aucun parti n’a pris le risque, même au niveau régional, de refuser un compromis et de provoquer une crise politique. C’est la devise « Le pays avant le parti » ».
Au sein du parti majoritaire, certains pointent du doigt la politique « pas assez à droite » d’Angela Merkel, qui explique la percée électorale de l’AfD. « Ne tournons pas autour du pot, le résultat de l’élection constitue une amère déception. Nous avons délaissé notre flanc droit et il nous appartient à présent de combler le vide avec des positions tranchées » a estimé hier soir Horst Seehofer, le président de l’aile bavaroise et conservatrice du parti de la chancelière (CSU).
Celle-ci a reconnu que « nous espérions un meilleur résultat. Nous sommes face à un nouveau grand défi, l’entrée de l’AfD au Bundestag. Nous allons reconquérir ces électeurs et électrices de l’Alternative pour l’Allemagne » a-t-elle martelé. En attendant, Angela Merkel va devoir trouver les forces politiques avec qui elle gouvernera ces quatre prochaines années.