Les tensions sont vives en Catalogne tandis que Madrid tente d’empêcher la tenue du référendum d’indépendance prévue dimanche. Ailleurs en Europe, la fièvre sécessionniste tend à se calmer, notamment en Ecosse et en Italie du Nord.
Dimanche prochain, les Catalans sont invités à se prononcer par référendum sur l’indépendance de leur nation. Une consultation particulièrement aléatoire dans la mesure où elle a été jugée inconstitutionnelle par Madrid.
Le gouvernement central a fait saisir des bulletins de vote ainsi que des urnes, a procédé à l’arrestation d’une dizaine de membres de l’exécutif régional catalan et a pris le contrôle financier de la région. Autant dire que, même en cas de victoire massive du « oui », l’indépendance de la Catalogne ne sera pas un long fleuve tranquille…
Le président de la Généralité de Catalogne Carles Puigdemont a beau appeler au dialogue et affirmer qu’une victoire du « oui » signifierait tout au plus le début d’un long processus de négociation, on ne voit guère comment les choses pourraient avancer. Avant tout parce que les adversaires de l’indépendance vont boycotter cette consultation illégale, ôtant ainsi toute signification au résultat du scrutin.
Il y a d’ailleurs un précédent : celui du référendum de novembre 2014 qui avait vu le « oui » à l’indépendance l’emporter à 80% mais avec une participation inférieure à 40% et qui n’avait débouché sur rien.
Cela dit, l’extrême fermeté du gouvernement espagnol a suscité beaucoup de manifestation de solidarité en Europe, à commencer par le pays basque.
Basques et Ecossais solidaires mais assagis
Peut-on en effet oublier les attentats de l’ETA qui ont fait 829 victimes entre 1969 et 2010, date à laquelle l’organisation pour la libération du pays basque a renoncé à la violence ? Depuis, les nationalistes sont installés au pouvoir à Bilbao mais ils ont mis en sourdine leur séparatisme. Il faut dire que la communauté autonome basque jouit d’une complète autonomie fiscale à l’égard de Madrid, bien plus large que celle des Catalans.
Très intéressés eux aussi, les Ecossais qui sont décidés à organiser un nouveau référendum d’indépendance depuis la victoire du Brexit qu’ils avaient rejeté à 62%. Mais Nicola Sturgeon, première ministre d’Ecosse et leader du parti national écossais SNP, a dû tempérer son enthousiasme après la déconvenue de son parti aux élections générales de juin qui ont vu le SNP perdre 21 des 56 sièges de députés à la Chambre des communes qu’il détenait depuis 2015.
Du coup, elle n’envisage plus de consultation avant le printemps 2019, une fois conclues les négociations du Brexit. On se souvient par ailleurs qu’en septembre 2014, le dernier référendum sur l’indépendance, organisé lui avec l’aval de Londres, avait vu le « non » l’emporter à 55%.
Donc, les perspectives d’indépendance de l’Ecosse ne sont pas très élevées, surtout pour une population qui aura déjà vécu le traumatisme de la sortie de l’Union européenne…
Le nationalisme flamand ronronne
Autre manifestation de solidarité, plus surprenant celle-là, celle du leader nationaliste flamand Bart de Wever, président du NV-A. Plus surprenante, car depuis qu’il soutient le gouvernement libéral de Charles Michel, de Wever avait mis de côté son objectif de donner à la Flandre son indépendance par rapport à la Belgique.
En ressortant aujourd’hui cet étendard, le leader du NV-A espère enrayer la remontée gênante pour son parti des nationalistes flamands du Vlams Belang dans les sondages.
Lombards et Vénitiens ne rêvent plus que d’autonomie
En Italie, le rêve d’une « Padanie » indépendante semble s’être évanoui avec le changement de leadership à la Ligue du Nord. La sécession de l’Italie septentrionale pour se débarasser – dixit la Ligue – des « corrompus » de Rome et des « flemmards » du Mezzogiorno était l’objectif d’Umberto Bossi, le fondateur de la « Liga ».
Mais Bossi, diminué physiquement et englué dans des scandales de corruption, a du laisser la place à Matteo Salvini, bien plus nationaliste que régionaliste. Désormais, la Ligue ne crie plus « débarassez-nous des sudistes ! » mais « dehors les musulmans ! ».
Pourtant, les velléïtés de séparatisme n’ont pas disparu au nord. Le ligueur Luca Zaia, président de Vénétie, avait déjà organisé une consultation séparatiste en 2014. Il récidive le 20 octobre prochain de concert avec la région Lombarde dirigée par un autre cacique de la Ligue, Roberto Maroni.
Mais cette consultation informelle dans ces deux riches régions – 30% du PIB italien – ne vise cette fois qu’à obtenir plus d’autonomie vis-à-vis de Rome, un peu sur le modèle du Trentin-Haut-Adige, le sud-Tyrol Italien.
L’heure est à l’apaisement en Corse
Les nationalistes de Femu a Corsica et de Corsica Libera contrôlent désormais l’assemblée de Corse, Gilles Simeoni étant pour sa part devenu président du conseil exécutif. Mais pour ces mouvements, l’indépendance du territoire n’est plus qu’un lointain objectif à atteindre et ce, de façon très progressive. En pratique, les nationalistes visent désormais une autonomie renforcée sur les plans économique, judiciaire, culturel et touristique. L’heure est à l’apaisement…
Folklores breton, alsacien ou bavarois
C’est en fait le cas pour toutes les revendications sécessionnistes. Les attentats de ces dernières décennies n’ont plus cours. Plusieurs mouvements indépendantistes sont devenus totalement marginaux comme en Bretagne, Alsace ou Bavière.
Là où il continue de recueillir un large soutien de la population, l’objectif d’indépendance est lointain et n’est plus envisagé qu’au terme d’un lent processus de négociation passant par des autonomies renforcées. Malgré l’agitation actuelle, la Catalogne ne fait pas exception à cette tendance.