La limitation des routes à 80 km/h fait polémique en France. Elle existe ailleurs en Europe sans qu’une corrélation évidente puisse être établie entre vitesse réduite et baisse du nombre d’accidents graves.
Ainsi que vient de l’annoncer le gouvernement, la vitesse sur les 400.000 kilomètres de routes secondaires françaises à double sens de circulation sera, à compter du 1er juillet prochain, limitée à 80 km/h au lieu des 90 imposés en France depuis décembre 1973.
Une décision qui fait suite à une expérimentation menée de 2015 à 2017 sur 86 kilomètres de voies mais dont les résultats n’ont pas été publiés. Ce qui, bien sûr, alimente la fronde des multiples opposants à la décision qu’ils soient élus locaux ou associations d’usagers de la route.
Limitations : 80, 90, 100…
Dans ce contexte, il est intéressant d’observer ce qui se passe à cet égard chez nos voisins européens. Plusieurs pays imposent déjà une limitation à 80 sur leurs voies hors agglomération : la Suisse, les Pays-Bas, le Danemark, la Norvège, Malte…
D’autres, comme la Grèce, l’Italie, l’Espagne ou le Portugal sont à 90 km/h comme la France actuellement. D’autres encore ont des limitations plus élevées : 60 miles au Royaume-Uni, soit 96 km/h, et même 100 km/h en Allemagne ou Autriche.
Enfin, Il faut préciser que seule une dizaine de pays en Europe ont une limitation unique concernant toutes les routes hors agglomération et hors autoroutes ou voies express. Souvent, on distingue routes principales ou nationales et routes secondaires et deux limitations sont imposées, 70/90 ou 80/100.
Notons que, depuis une date récente, la Belgique est divisée en deux puisque le réseau secondaire flamand est désormais limité à 70 km/h contre 90 dans le reste du pays.
Le Danemark passe de 80 à 90
Si l’on considère les toutes dernières années et à l’exception de la Flandre et de ses 70 km/h, on n’observe pas de tendance à la diminution des vitesses maximales autorisées sur route.
Il y a au contraire un exemple inverse, celui du Danemark, qui vient nourrir les arguments des adversaires de la limitation à 80 en France.
Ce pays scandinave a ainsi mené de 2011 à 2014 une expérience de relèvement de 80 à 90 km/h de la limitation sur certaines voies. Le bilan est étonnant.
D’une part, la vitesse moyenne effective mesurée ne s’est accrue que de 0,2 km/h car les conducteurs respectaient mal la limitation à 80 km/h. Ensuite, le trafic s’est fluidifié, les dépassements étant moins nombreux. Du coup, le nombre d’accidents a diminué.
Face à ces constatations, le gouvernement Danois a relevé l’an dernier à 90 km/h la limitation sur un certain nombre de voies hors agglomérations. Quelques années auparavant, il avait également relevé de 110 à 130 km/h la limitation de vitesse sur autoroute.
Autoroutes : 120, 130 ou… rien
Une grosse moitié des pays européens limitent, comme la France, à 130 km/h la vitesse sur autoroute. Ailleurs, la limitation est en général de 120 – notamment chez nos voisins belges et espagnols – mais elle est parfois encore plus réduite comme au Royaume-Uni où la « speed limit » est fixée à 70 miles/h, soit 112 km/h. Un seul pays, la Pologne, affiche une limitation à 140 km/h.
Enfin, bien sûr, il y a le cas de l’Allemagne où plus de 50% des autoroutes ne sont assorties d’aucune limitation impérative de vitesse, même si la vitesse maximale « conseillée » est de 130 km/h. Sur le reste du réseau autoroutier allemand, la vitesse est en général plafonnée à 120.
Allemagne : vitesse élevée, mortalité modérée
100 km/h sur route, pas de limites sur 50% des autoroutes, l’Allemagne devrait être un pays dangereux, d’autant que l’état du réseau routier et même autoroutier y est médiocre.
Pourtant, force est de constater qu’il y a beaucoup moins d’accidents routiers graves en Allemagne qu’en France : 39 tués par million d’habitants outre-Rhin en 2016 contre 53 en France.
Parmi les pays les moins accidentogènes, on trouve la Suède (27 tués pour un million) où les vitesses autorisées sont assez réduites mais également la Grande Bretagne (28 tués pour un million) où la vitesse sur route est plutôt élevée.
Des amendes parfois très lourdes
Il faut dire qu’outre-Manche, les amendes pour excès de vitesse sont très dissuasives puisque les tarifs sont fonction du revenu individuel.
Un excès de vitesse de 30 à 50 km/h sur route peut valoir au contrevenant une amende correspondant à la totalité de son salaire hebdomadaire : 500 € pour un revenu moyen mais 1.500 ou 2.000 € pour un cadre supérieur. Des sommes qui ne peuvent être atteintes en France que pour de très gros excès de vitesse avec récidive.
Soulignons toutefois que l’amende maximale est plafonnée à 3000 € outre Manche. Mais en Finlande, où ce système d’amendes proportionnelles au revenu est pratiqué, il n’y a aucun plafond. En 2015, un homme d’affaire opulent a ainsi écopé d’une amende de 54.000 € pour un excès de vitesse de 23 km/h !! Ce qui n’empêche pas la mortalité routière finlandaise d’être nettement plus élevée qu’en Suède…
Il n’y a donc pas de recettes miracle contre les accidents. La vitesse, l’état du réseau, l’intensité des contrôles ou la sévérité de la répression ont évidemment une influence sur l’accidentologie. Mais, en la matière, rien ne remplacera la prudence, la vigilance et le sens des responsabilités des conducteurs.