Le service national universel proposé par le gouvernement imposerait un enrôlement obligatoire d’un mois. En Europe, outre les quelques pays ou le service militaire reste en vigueur, il n’existe que différentes formes de service civique sur la base du volontariat.
Vingt deux ans après l’abolition du service militaire obligatoire, la France se prépare à rétablir une forme de conscription pour les jeunes de 16 à 25 ans.
Le projet de service national universel (SNU) dévoilé le 27 juin dernier consiste en effet à imposer à l’ensemble d’une classe d’âge un enrôlement obligatoire d’une durée d’un mois autour de l’âge de 16 ans.
Parce qu’il est imposée à tous, ce SNU se distingue du service civique qui connaît par ailleurs un succès croissant en France comme dans les autres pays européens ayant aboli le service militaire.
Le défi de ce service national universel évoqué par Emmanuel Macron durant sa campagne présidentielle est celui de l’intégration sociale de la jeunesse. Une intégration passant par le brassage de l’ensemble d’une classe d’âge – soit en France environ 750.000 personnes – comme le faisait jadis le service militaire.
Le retour d’un service obligatoire en France
D’où la nécessité de rendre ce service obligatoire pour tout le monde. Pour des raisons de coût, la durée de cette « conscription » a été limitée à un mois en deux phases de quinze jours. Une première phase dite « de cohésion » prévoit un hébergement collectif dans les internats de l’éducation nationale ou les centres de logement étudiants. Une deuxième phase de quinze jours, plus personnalisée, se fera ensuite en petits groupes dans le cadre d’associations.
Enfin, une troisième phase, cette fois facultative, offrira au moins de 25 ans la possibilité de s’engager pour une période de 3 à 12 mois dans diverses activités relevant de la défense, de l’environnement, du social…
Cette troisième phase du service universel, qui méritera d’être précisée à l’issue d’une période de consultation nationale, se distingue du service civique volontaire par le fait qu’elle intègre d’éventuelles activités à caractère militaire.
Mais, fondamentalement, les objectifs des deux disposifs sont différents : intégration sociale pour le SNU qui doit donner à la jeunesse des valeurs communes ; insertion professionnelle pour le service civique.
De fait, on observe que 75% des jeunes ayant eu un parcours de service civique de 6 à 12 mois ont trouvé un emploi et une formation. Plus de 125.000 jeunes ont suivi en 2017 un tel parcours pour un coût budgétaire d’environ 400 millions d’euros.
Le service universel, pour ce qui est du mois obligatoire pour tous, devrait coûter, estime-t-on, 1,6 milliard. Quatre fois plus.
Des services civiques volontaires partout en Europe
Ailleurs en Europe, où la plupart des pays ont aboli ces vingt dernières années le service militaire obligatoire, sont apparues diverses formes de service civique.
Notamment en Allemagne où 180.000 citoyens, pas forcément des jeunes, s’engagent chaque année dans l’une des formes de service volontaire dans le domaine du social, de l’écologie, du développement. En Italie, le service civil national concerne de 35 à 40.000 jeunes de 18 à 28 ans par an.
Des populations bien plus importantes sont touchées dans d’autres pays. Au Royaume-Uni, le « Young Volunteeer Service » concerne 200.000 jeunes mais pour des activités d’une durée parfois réduite. En Suède, dans le cadre des mouvements de jeunesse, plus de 600.000 jeunes sont engagés dans des activités bénévoles…
Toutes ces activités sont proposées sur la base du volontariat. C’est bien ce qui fait la spécificité du service national universel envisagé en France. Ce dernier n’a aucun équivalent en Europe. Cela dit, plusieurs pays de l’UE conservent un système de conscription militaire auquel la jeunesse ne peut se soustraire.
Le service militaire désormais en vigueur dans sept pays
Quatre pays ont maintenu un service militaire obligatoire. Il dure six mois en Autriche, n’est obligatoire que pour les hommes et se transforme en service civil de 9 mois pour les objecteurs de conscience.
En Finlande, la traditionnelle méfiance à l’égard du voisin russe a fait maintenir un service militaire de cinq mois et demi. Pour les mêmes raisons, l’Estonie appelle les jeunes sous les drapeaux pour 8 à 11 mois.
Enfin, la Grèce, toujour soucieuse de se protéger des agissements de la Turquie, intègre dans l’armée tous les jeunes hommes pendant 9 à 12 mois.
Il faut en outre signaler le cas particulier du Danemark où, depuis quelques années, le service militaire de 4 mois est devenu facultatif pour une raison simple : les engagés volontaires sont désormais plus nombreux que les besoins de l’armée !
En Suède, la conscription concerne aussi les femmes
C’est exactement l’inverse de ce qui s’est passé en Suède et qui a poussé ce pays à rétablir une conscription supprimée en 2010. Car, en 2015, les aspirants soldats n’ont été que 1.300 contre un besoin annuel de 4.000. L’agressivité diplomatique de la Russie inquiétant les Suèdois eux aussi, un service militaire obligatoire de 9 à 12 mois a donc été rétabli en 2017.
Même si les conscrits sont sélectionnés en fonction des besoins, l’originalité de la nouvelle conscription suédoise est qu’elle concerne aussi bien les hommes que les femmes.
Notons enfin que, deux ans auparavant, la crainte de l’expansionnisme russe avait poussé également la république balte de Lituanie à remettre en place une conscription de 9 mois.
En somme, sept pays européens sur 28 ont recours aujourd’hui à la conscription militaire. Mais le projet français de « conscription civile », même limitée, reste unique.