La hausse des taxes pour un tiers, la hausse du pétrole brut pour deux tiers expliquent la flambée du prix des carburants. Mais sur le diesel, anglais, italiens, belges et suédois doivent débourser davantage. Heureusement, les cours du brut refluent.
Le 17 novembre prochain promet d’être chaud. Un grand nombre d’associations et certains partis politiques appellent en effet les Français à manifester leur colère face à la hausse constante du prix des carburants.
Une hausse qui pénalise bien sûr en premier lieu la France péri-urbaine et rurale, celle qui ne peut éviter de prendre sa voiture – le plus souvent alimentée au diesel – pour aller travailler. Afin de calmer une grogne exacerbée par la hausse des taxes sur l’énergie, le président de la république promet des aides défiscalisées ainsi qu’une hausse du chèque-énergie.
La défense du pouvoir d’achat mise à mal
Plus que le niveau absolu des prix, c’est surtout le contexte politique qui permet d’expliquer ce raz-le-bol des Français. Car en 2012, le prix de l’essence sans plomb était monté jusqu’à 1,65 € le litre (contre 1,54 actuellement) même si le diesel était resté un peu inférieur au prix actuel (1,45 contre 1,52 €).
Reste que, depuis le début de l’année, nos concitoyens ont subi des hausse de 10% du sans plomb, de 18% du diesel, et de 30% du fioul domestique. Pour certains usagers, cela peut représenter plus de cent euros de surcoût mensuel. C’est d’autant plus mal ressenti que ces augmentations s’expliquent en partie par une hausse des taxes au moment où le gouvernement tente de démontrer aux Français qu’il se bat pour leur pouvoir d’achat…
En outre, l’argument de l’indispensable lutte contre le réchauffement climatique perd de son impact lorsque l’on sait que le financement de la transition énergétique ne reçoit que 20% du produit de la Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (la TICPE) qui atteint 35 milliards d’euros par an.
Deux tiers, un tiers
L’envol des prix du pétrole est le premier facteur de la hausse, mais pas tout à fait dans les proportions avancées mardi par le président Macron qui attribue au brut « 70 à 80% de l’augmentation ».
En réalité, la hausse du brut explique directement 50/52% du renchérissement du carburant et de 62 à 64% si l’on tient compte de la TVA qui s’y ajoute mécaniquement.
Quant aux taxes – la TICPE et la TVA qui s’y rapporte – elles rentrent pour 20% dans la hausse du prix du Sans plomb et de 30% dans celle du diesel. Le reliquat, ce sont les frais de raffinage et la marge des distributeurs. Donc, en gros, un tiers pour les taxes, deux tiers pour le pétrole.
Essence : très chère en Italie
On ne saurait prétendre que le carburant est plus cher en France qu’ailleurs. A environ 1,54 € le litre au début novembre, le prix de l’essence sans plomb 95 se situe au 7ème rang européen, à peu près à égalité avec l’Allemagne mais derrière le Danemark, les Pays-Bas, la Grèce et surtout l’Italie où le Sans Plomb 95 se vend actuellement 1,66 €.
A l’inverse, des pays comme la Belgique ou l’Espagne vendent le litre d’essence à 10, voire 20 centimes de moins qu’en France.
Diesel : la Suède en pointe
Malgré la forte augmentation de cette année qui traduit la volonté d’égalisation des taxes entre essence et gazole, le diesel coûte 1,52 € en France mais encore plus dans sept pays européens.
Ce ne sont pas tout à fait les mêmes que pour l’essence : si on y retrouve l’Italie, on y découvre cette fois la Belgique, le Royaume-Uni et surtout la Suède où il frise les 1,60 €. En revanche, le diesel coûte encore dix centimes de moins en Allemagne et aux Pays-Bas.
Enfin, si l’on évoque le fioul domestique, qui a augmenté en France de 30% en un an pour dépasser les 1000 € pour 1000 litres, l’Hexagone n’est plus qu’à la douzième place européenne. Par exemple, les Italiens achètent 1000 litres de fioul pour plus de 1300 € et les Danois déboursent même 1450 € !
Le gazole français flambe en 2018
Si le niveau des prix reste donc dans les moyennes en France, leur augmentation est en revanche rapide depuis le début de l’année. Ce qui peut expliquer que les manif contre l’essence chère ne se produisent pas ailleurs.
Pour le Sans Plomb 95, les hausses observées dans l’Hexagone – de l’ordre de 10,5% – sont du même ordre que celles atteintes en Allemagne ou en Autriche. Mais le renchérissement n’est en général que de 5 à 8% dans la plupart des pays.
Sur le diesel en revanche, la France est nettement en pointe avec sa politique de rattrapage. Avec plus de 18% de hausse depuis le début de l’année, elle détient le record européen même si l’Allemagne, l’Autriche ou la Belgique ne sont pas très loin (14 à 16%).
Désormais, les prix de l’essence et du gazole sont pratiquement au même niveau en France bien que le niveau de la fiscalité diesel soit encore inférieur. Dans une majorité de pays, l’écart de prix en faveur du diesel est de 8 à 10 centimes, parfois plus de 20 centimes comme aux Pays-Bas. A l’inverse, le diesel est plus onéreux que l’essence au Royaume-Uni, en Belgique et en Suède.
Taxes : elles n’augmentent qu’en France et en Belgique
La France est pratiquement le seul pays de l’Union à avoir augmenté ses taxes en 2018, seule la Belgique ayant fait de même. Partout ailleurs, il a sans doute été jugé plus « politique » de ne pas alourdir l’imposition en période de hausse du prix du pétrole.
Mais cette période pourrait toucher à sa fin. La flambée des cours du pétrole constatée entre août et octobre est en effet terminée et, depuis un mois, le cours a rebaissé de 15%.
Cela signifie que, vers le début de l’année prochaine, les prix des carburants devraient de nouveau s’orienter à la baisse. Une bonne nouvelle pour le gouvernement s’il veut faire « avaler » à l’opinion les nouvelles hausses de taxes programmées sur les carburants et le fioul !