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Le Brexit bouleverse la donne politique dans toute l’Europe

mercredi, 6 février, 2019 - 16:04

La perspective d’un divorce chaotique d’avec le Royaume-Uni a refroidi les velléïtés des populistes de rompre avec l’Union. Désormais influents, ils choisissent plutôt de changer l’Europe de l’intérieur. Avec le soutien de plus en plus fréquent de la droite classique.

Voilà une conséquence du Brexit que l’on n’attendait pas ! Face au feuilleton cauchemardesque que constitue la pénible rupture entre le Royaume-Uni et l’Union européenne, les populistes européens ont changé leur fusil d’épaule.

Tous ceux qui, en France, en Italie, aux Pays-Bas, en Autriche, en Suède… réclamaient dans la foulée du vote britannique de 2016 la tenue dans leur pays d’un référendum de sortie de l’UE n’en parlent plus ou même abandonnent explicitement l’idée.

Ce n’est pas que les partis populistes se soient soudain débarrassés de leur europhobie. Mais la pagaille économique et politique engendrée au Royaume-Uni par le feuilleton lancinant d’un Brexit qui risque de se réaliser sans accord a fait réfléchir tous les adversaires déclarés de l’Union européenne. Le prix de l’ « exit » leur semble aujourd’hui trop lourd.

De surcroît, les mouvements populistes participent désormais au gouvernement en Autriche et, surtout, en Italie depuis 2018. Après le basculement de la Hongrie, de la Pologne, de la République tchèque et la montée en puissance de ces partis en Suède, aux Pays-Bas, en France et en Allemagne, les populistes sont donc désormais convaincu qu’ils auront bientôt la capacité politique de changer l’Europe de l’intérieur sans prendre le risque inutile de plonger leur pays dans le chaos avec une sortie brutale de l’Union européenne.

Les « Ligueurs » italiens s’accordent avec Bruxelles

Première illustration de ce revirement, l’Italie, où la Ligue de Matteo Salvini, devenu l’emblématique ministre de l’intérieur du gouvernement Conte, a toujours affiché un euroscepticisme virulent.

Compte tenu des positions également assez anti-européennes de ses partenaires de la coalition, le mouvement Cinq Etoiles, ce ne fut pas vraiment une surprise de voir le pouvoir italien présenter à l’automne un budget très expansionniste vite jugé inacceptable par Bruxelles.

Ce que l’on n’attendait pas, c’est que le gouvernement italien, confronté à un ultimatum de la commission européenne, obtempérât si vite pour rentrer dans les clous budgétaires.

Un recul à vrai dire politiquement peu coûteux pour La Ligue puisqu’il se concrétise par un report de l’instauration d’un revenu de base qui était la mesure phare des Cinq Etoiles… Reste que l’homme fort de l’Italie a délibérément choisi de ne pas fâcher Bruxelles.

Le Pen met des gants, les populistes danois aussi

En France, on se souvient que Marine Le Pen avait pris ses distances avec la sortie de l’euro à la fin de la campagne présidentielle de 2017.

Aujourd’hui, plus question d’agiter la menace d’un « Frexit ». Saluant la poussée des partis « nationaux » sur le continent, la dirigeante du Rassemblement National a récemment annoncé que, pour la première fois, « on peut espérer changer l’Europe depuis l’Europe ». Et passer, « de l’Union européenne à une alliance de l’Europe des Nations ».

Cette importante inflexion vient également de se produire début février en Suède ou Jimmie Akesson, leader des « démocrates suédois » – un parti d’extrême droite, en fait – annonce qu’il ne prône plus le « Swexit » mais, lui aussi, une réforme de l’intérieur.

Autriche, Pays-Bas, Scandinavie : les discours se modèrent

En Autriche, les membres du « parti de la liberté » gouvernent depuis un peu plus d’un an avec les conservateurs du jeune chancelier Sebastian Kurz. Ils n’ont aucun intérêt à faire des mauvaises manières à Bruxelles, la politique très ferme de Kurz sur l’immigration leur convenant parfaitement.

D’autres formations d’extrême droite, en Europe, se contentent de ne plus évoquer la rupture avec l’Union, notamment aux Pays-Bas, au Danemark, en Finlande.

Bien sûr, les partis ultra-conservateurs et nationalistes au pouvoir en Pologne et en Hongrie ne songent aucunement à renier une Union qui les finance abondamment… Pas plus d’ailleurs que le « Donald Trump » tchèque, Andrej Babis.

Nouvelles convergences entre droite et extrême droite

La détermination des partis populistes d’en découdre avec l’Union les rendaient difficilement fréquentables aux yeux des conservateurs qui devaient remiser leurs éventuelles velléïtés d’alliance. Mais le changement de ton des populistes fait sauter ce verrou.

On l’a d’ailleurs très bien vu en France où l’ancien ministre « Les Républicains » Thierry Mariani vient de rejoindre sans vergogne le Rassemblement National parce qu’ « il n’est plus anti-européen ».

Le rapprochement entre populistes et droite classique est aussi facilité par le fait que les conservateurs se mettent dans les pas des populistes en matière de contrôle strict des flux migratoires.

C’est le cas en Autriche ou Sebastian Kurz tend sur ce thème la main à la chancelière allemande mais également au gouvernement italien.

Une pareille convergence sur l’immigration avait été observée il y a quelques temps aux Pays-Bas, au Danemark et en Finlande. Et même en France, on ne peut nier la droitisation du leader des Républicains Laurent Wauquiez.

Où sont passés les « progressistes » chers à Macron ?

Voilà qui n’arrange pas la stratégie européenne d’Emmanuel Macron. L’idée macronienne d’un affrontement entre « progressistes » et « populistes » paraît bien déconnectée de la réalité, surtout quand on constate l’effondrement des partis de centre gauche en France, aux Pays-Bas, en Italie, en République tchèque et même en Allemagne.

En réalité, comme le soulignait cet automne le quotidien britannique « The Telegraph », l’homme que Macron va devoir affronter, bien plutôt que les populistes, « c’est le jeune et rusé promoteur de l’’axe de la volonté’ qui n’est autre que le chancelier autrichien Sebastian Kurz ».


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