Après les élections législatives, le Kazakhstan poursuit sa transition démocratique

Le 10 janvier dernier, les électeurs du Kazakhstan se sont rendus aux urnes pour renouveler la chambre basse de leur Parlement. Un test pour cette république d’Asie centrale qui connaît depuis deux ans une modernisation politique à petits pas.
Un test de taille, puisqu’il s’agissait du premier scrutin législatif organisé depuis l’éloignement du pouvoir de Noursoultan Nazarbaïev, l’homme qui a présidé aux destinées du Kazakhstan pendant près de trente ans. Le parti majoritaire Nour Otan est arrivé en tête avec 71% des voix, le taux de participation atteignant 63% des inscrits, en pleine épidémie de Covid.
Ce scrutin a fait l’objet d’une surveillance internationale particulière, mobilisant près de 400 observateurs, diligentés pour partie par l’ Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Des voix se sont élevées en Europe pour déplorer le caractère irrégulier d’élections tenues en l’absence de la principale formation d’opposition, d’un des six partis d’opposition, qui avait décidé de boycotter le scrutin. Des dizaines de journalistes étrangers présents sur place ont sillonné le pays le jour du scrutin, découvrant, comme le reporter français Jean-Baptiste Giraud « une organisation des élections redoutablement efficace, largement au niveau des standards européens ».
Deux ans d’ouverture à la société civile
Paradoxalement, ces critiques interviennent au moment où le Kazakhstan multiplie les efforts en faveur de la démocratie interne et des droits de l’Homme. Kassym-Jomart Tokayev, le successeur de Nazarbaïev, a fait de ce dossier l’un des axes majeurs de sa présidence. Dès son arrivée au pouvoir, le chef de l’Etat a lancé un programme de réformes destiné à rétablir la confiance entre les élites dirigeantes et la population, confiance émoussée auprès de la jeunesse urbaine. En oeuvrant en faveur de la modernisation politique, M. Tokayev a aussi en ligne de mire les pays occidentaux, dont il entend accroître les investissements pour diminuer la dépendance économique de son pays aux hydrocarbures.
Au coeur de ce bloc de réformes figure le concept « d’Etat à l’écoute », une entreprise de transparence et de responsabilisation des autorités destinée à rompre avec le sentiment de corruption toujours répandu depuis la transition avec le régime soviétique. Cette démarche s’est traduite par la création, en décembre 2019, du Conseil national sur la confiance publique, une instance pensée comme un canal d’échange avec la société civile. Au même moment était décidé un assouplissement de la loi sur les réunions politiques. Autre mesure phare de ce premier paquet de réformes démocratiques (un deuxième a été adopté fin 2020), l’instauration d’un quota de 30% de femmes et de jeunes sur les listes des partis. « Un moyen imparable de renouveler en profondeur la classe politique, en évacuant la vieille garde avec élégance » observe Jean-Baptiste Giraud.
L’abolition de la peine de mort en vigueur depuis janvier
Mais le geste le plus significatif de la politique d’ouverture initiée par Tokayev fut sa décision, prise en début de mandat, d’abolir la peine de mort. Jusqu’alors, celle-ci faisait l’objet d’un moratoire. Avec l’entrée en vigueur de cette mesure, le 2 janvier dernier, le Kazakhstan est venu ajouter son nom à la liste des anciennes républiques soviétiques ayant rompu avec la peine capitale. Une liste dont est toujours absente la Biélorussie, tandis que la Russie n’a pas édicté d’interdiction explicite. Cette décision avait beaucoup pesé dans le satisfecit adressé par la diplomatie européenne au président kazakhstanais un an après son entrée en fonction, le porte-parole de Josep Borell évoquant alors « des progrès impressionnants dans ses efforts de modernisation et de réforme ».
Les législatives passées, Kassym-Jomart Tokayev entend désormais approfondir cette démarche lente mais assumée, conceptualisée sous le nom de « démocratisation contrôlée ». Le 15 janvier dernier, il a présenté devant l’Assemblée nouvellement élue un troisième ensemble de réformes destinées à renforcer les droits des citoyens. Parmi elles, l’abaissement du seuil de voix nécessaires pour l’obtention de sièges au Parlement, la formalisation du droit de pétition en ligne et le renforcement du Commissariat aux Droits de l’homme.