Le conflit entre l'Union européenne et l'industriel suédois-bitannique révèle les blocages de production liés à la propriété industrielle. La suspension provisoire des brevets permettrait à des pays très touchés par le Covid, comme l'Inde, de produire sur place les vaccins attendus.
L’image du vaccin AstraZeneca s’est fortement détériorée depuis le lancement de sa commercialisation. Les erreurs de communication du laboratoire suédois-britannique ont été nombreuses, suscitant une méfiance dans plusieurs pays qui en ont restreint l’utilisation. De fait, le vaccin est peu utilisé en France, par exemple, alors qu’il est à la base du succès du programme de vaccination au Royaume-Uni.
Il semble de plus en plus évident que les industriels dictent leur loi auprès des agences de régulation. Et l’Europe considère que AstraZeneca n’a pas rempli ses engagements sur les livraisons de son vaccin. C’est pourquoi l’UE a entamé une action en justice, la Commission européenne considérant que « les termes du contrat n’ont pas été respectés et l’entreprise n’a pas été en position de mettre en oeuvre une stratégie fiable afin d’assurer des livraisons en temps et en heure ». Au premier trimestre, l’industriel n’a livré aux pays de l’UE que 30 millions de doses sur les 120 promis. Au deuxième trimestre, 70 millions doses devraient être distribuées – contre les 180 millions prévues.
Les brevets sont une entrave à la politique de vaccination mondiale
Alors que les Etats-Unis ont promis une livraison de 60 millions de doses du vaccin AstraZeneca, dont ils ne se servent pas, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et plusieurs pays, dont l’Inde, actuellement dans une situation sanitaire catastrophique, demandent la levée des brevets. L’Inde et l’Afrique du Sud ont en effet demandé aux industriels d’accorder une dérogation temporaire sur les droits de propriété intellectuelle de leurs produits afin que n’importe quel pays puisse produire ces vaccins.
La situation autour des brevets ressemble beaucoup à celle qui a accompagné la commercialisation des premières multithérapies contre le VIH, à la fin des années 90. La production de génériques à bas prix a ainsi permis de réduire l’incidence du VIH dans des pays très touchés comme le Brésil ou l’Inde. Mais les grandes compagnies pharmaceutiques sont opposées à la suspension même provisoire des brevets, avec l’argument que la propriété intellectuelle est précisément la garantie qui leur permis d’investir pour mettre appoint des vaccins efficaces en un temps record.
Elles ont pourtant bénéficié de l’aide des Etats.