La guerre en Ukraine multiplie les risques de pénurie de traitements pour les maladies transmissibles. Les réfugiés devraient avoir accès à des tests de dépistage à leur arrivée dans les pays qui leur offrent asile. La remontée de l'incidence du Covid en Europe coïncide avec un conflit majeur.
« La guerre et les épidémies ont toujours été intrinsèquement liées, quel que soit le conflit, l’époque, le continent » a récemment rappelé Michael Ryan, le directeur des programmes de gestion des urgences sanitaires de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Avec plus de 2 millions de réfugiés qui ont quitté l’Ukraine, l’OMS s’inquiète des conséquences sur la santé pour la population et de la réduction des soins essentiels pour le Covid-19, le cancer, le diabète, la tuberculose et les troubles de la santé mentale. Certains hôpitaux ont été touchés par les tirs de l’armée russe et le personnel médical rencontre de plus en plus de difficulté pour assurer les soins.
Un fonds de 3,5 millions de dollars a été débloqué afin d’aider à assurer les fournitures médicales urgentes. Malgré le conflit, l’OMS tente d’acheminer des capacité en oxygène pour aider les malades du Covid. « Les risques sont d’autant plus importants que l’Ukraine avait une très mauvaise couverture vaccinale avant le conflit, avec seulement 35% de la population immunisée » a déclaré le Pr Antoine Flahaut, épidémiologiste et directeur de l’Institut de santé globale à Genève. « Le contexte est d’autant
plus favorable au virus que la fatigue, le manque de nourriture et de
sommeil ou encore le stress contribuent à affaiblir le système
immunitaire des personnes touchées par les affrontements », selon Michael Ryan.
VIH, tuberculose, Covid
Dans une tribune publiée dans The Telegraph, le chercheur Michel Kazatchkine a lancé un cri d’alarme : « Nous ne pouvons pas laisser le conflit en Ukraine anéantir le traitement du VIH, de la tuberculose et de la Covid-19 en Europe de l’Est ». Déjà, depuis l’annexion russe de la Crimée et le conflit dans les régions de Donetsk et Luhansk en 2014, des pénuries de traitements contre le VIH et la tuberculose ont été remarquées, ainsi que les produits de substitution pour les consommateurs de drogues injectables. Les ONG travaillant avec les communautés touchées au Donbass ont été fermées, alors que l’Ukraine est un exemple en matière de réduction des risques.
C’est que le gouvernement russe est notoirement connu pour se désintéresser de l’épidémie du VIH, qui ne cesse de progresser en Russie, alors qu’elle est réduite presque partout ailleurs dans le monde. Quelque 1,6 million de personnes vivent avec le VIH dans la région (dont 70 % en Russie) et ce chiffre augmente de 146 000 nouvelles infections environ chaque année. La consommation de drogues représente près de 50 % des nouvelles contaminations, mais les rapports sexuels non protégés devraient devenir la première cause dans les années à venir. L’Europe de l’Est reste également l’épicentre mondial de la tuberculose multirésistante. Malgré les progrès réalisés au cours des dix dernières années, la prévalence de la tuberculose, les niveaux de mortalité et, en particulier, l’incidence de la tuberculose multirésistante restent élevés en Ukraine. Ainsi, le pays concentre la deuxième population de cas la plus importante dans la région.
Les 27 pays de l’Union européenne ont réservé plus de 10.000 lits d’hôpitaux pour des Ukrainiens, ont annoncé ce mardi la commissaire européenne à la Santé Stella Kyriakides et le ministre français Olivier Véran. La France pourrait accueillir de premiers patients « d’ici la fin de semaine ».