Le "mini-budget" du gouvernement de Liz Truss a provoqué une chute brutale de la Livre et les réactions négatives des institutions internationales, menaçant encore plus une économie mondiale menacée de récession.
Il y a encore deux semaines, le monde était accaparé par l’enterrement d’Elizabeth II. Mais trois semaines après sa prise de fonction, le gouvernement de Liz Truss, et notamment son chancelier de l’Echiquier (le ministre des finances) Kwasi Kwarteng, a provoqué une tempête financière qui dépasse les frontières du pays. Tout a débuté le vendredi 23 septembre lors de la présentation du « mini-budget » pour sortir le pays de sa pente inflationniste. Au programme : 45 milliards de Livres (50 milliards d’Euros) qui s’ajouteront à la dette du pays. Cet énorme stimulus fiscal bénéficiera aux plus riches avec les plus importantes réductions d’impôts depuis cinquante ans, mais aussi un gel des factures de gaz et d’électricité pour les ménages et les entreprises, sans vraiment expliquer comment le gouvernement compte le financer. Trois jours après, la réponse des marchés a été nette : la Livre Sterling a plongé à son plus bas niveau historique (1,035 dollar) et la banque centrale du Royaume-Uni a du intervenir pour stabiliser la Livre à 1,07 dollar.
Ce programme fiscal très idéologique et très libéral a vite été considéré par les commentateurs politiques comme une « opération suicide » pour l’économie du pays, qui panique la droite britannique, un mois après le départ humiliant de son précédent chef de file, Boris Johnson. « On pensait que le cabinet de Boris Johnson était le pire de notre histoire, celui-ci est pire encore », selon un poids lourd du Parti conservateur cité par Sky News. Et l’intervention de la Banque d’Angleterre, en désaccord avec Liz Truss, « est terriblement humiliante. Qui va expliquer aux Britanniques qu’à cause de ce mini-budget, ils vont devoir payer des centaines de livres sterling en plus pour leurs emprunts immobiliers ? », réagissait un ex-ministre, sur la chaîne privée.
Désaveu international
Les détails du nouveau budget ne seront révélés que le 23 novembre, ce qui renforce l’incertitude sur les marchés boursiers. Le risque de contamination internationale est important, d’autant plus que les risques de récession se confirment un peu partout, la Bourse de New York étant entrée dans une période de « bear market ». L’agence de notation Scope Ratings prévoit un déficit public à 7% pour l’année prochaine. L’agence de notation Moody’s a dénoncé un « choc de confiance », mettant en doute ‘la crédibilité de la stratégie fiscale du gouvernement ». Enfin, le Fonds monétaire international (FMI) a jugé que ce budget agrandirait le « creusement des inégalités ». «Nous ne recommandons pas de mesures budgétaires importantes et non ciblées à ce stade, car il est important que la politique budgétaire n’aille pas à l’encontre de la politique monétaire», a déclaré un de ses porte-parole.
Plus grave encore, les critiques de Washington qui prend ses distances avec la direction politique britannique. Car les relations entre les deux pays ne sont pas bonnes, malgré le soutien du Royaume-Uni à l’Ukraine. Lors de l’Assemblée générale des nations unies à New York, Liz Truss a réitéré son héritage Thatchérien et ses ambitions d’économie reaganienne. Joe Biden a sèchement twitté qu’il était « fatigué de l’économie de ruissellement ». Et il n’est désormais plus question d’un accord de libre-échange entre les deux pays. Reste à savoir si Liz Truss gardera son poste avant les prochaines élections, son premier mois au pouvoir étant déjà considéré comme « cauchemardesque ».