Critiquée pour son manque de courage contre les discriminations, la Fifa rate une occasion historique d'ouvrir un débat sur la place des personnes LGBTQ+ dans le football, mais aussi dans le sport en général.
La récente série de Netflix sur les dessous de la Fifa ne rassurera pas les amateurs d’un sport plus transparent et conscient des questions sociétales. En déclarant il y a quelques jours «Aujourd’hui, je me sens qatari, aujourd’hui je me sens arabe, aujourd’hui je me sens africain, aujourd’hui je me sens gay, aujourd’hui je me sens handicapé, aujourd’hui je me sens travailleur migrant », le président de la Fifa, Gianni Infantino n’est pas parvenu à convaincre. Au contraire, cette affirmation ressemble à) une négation de tous les sujets de société qui entourent la prestigieuse Coupe du Monde de football : les droits humains, notamment les droits LGBT, mais aussi ceux des travailleurs migrants.
Le brassard « One Love » a été créé par L’UEFA précisément pour apporter le thème de la tolérance envers les minorités dans le monde du football qui reste tristement imperméable au changements de la société. Sept équipes européennes espéraient porter ce brassard aux couleurs arc-en-ciel : l’Angleterre, le pays de Galles, la Belgique, le Danemark, l’Allemagne, les Pays-Bas et la Suisse. Mais la Fifa a menacé de sanctions ces équipes qui ont répondu par un communiqué : «La Fifa a été très claire, elle imposera des sanctions sportives si nos capitaines portent les brassards sur le terrain. En tant que fédérations nationales, nous ne pouvons pas demander à nos joueurs de risquer des sanctions sportives, y compris des cartons jaunes. Nous étions prêts à payer des amendes… mais nous ne pouvons pas mettre nos joueurs dans une situation où ils pourraient être avertis ou même obligés de quitter le terrain de jeu ».
La France en retard
La France a refusé d’apporter son soutien à l’opération « One Love » et son capitaine, Hugo Lloris avait annoncé ne pas vouloir porter le brassard. «Lorsqu’on est en France, lorsqu’on accueille des étrangers, on a souvent l’envie qu’ils se prêtent à nos règles, qu’ils respectent notre culture, et j’en ferai de même quand j’irai au Qatar, tout simplement», avait-il déjà dit la semaine dernière en conférence de presse. Cette envie de ne pas « politiser le sport » est compréhensible, mais la Coupe du monde au Qatar n’est-elle pas une grande entreprise de soft power? « Vous savez, chez les sportifs, il y a un côté « je respecte les règles, je respecte le cadre »», avait réagi la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra. Ces annonces interviennent alors que le site « Arrêt sur Images » révèle par ailleurs que la FFF aurait censuré une interview d’Hugo Lloris faite par l’ancien footballeur Yoann Lemaire, qui a révélé son homosexualité en 2004. Au cours de cet entretien, Hugo Lloris aurait comparé les insultes homophobes chantées dans les stades à un simple «folklore».
Déçu, l’Australien Josh Cavallo, l’un des premiers footballeurs à avoir publiquement évoqué son homosexualité, s’en est vivement pris mardi à la décision de la Fifa d’interdire le port de brassards aux couleurs de l’arc-en-ciel lors de la Coupe du monde au Qatar. « La Fifa a interdit à toutes les équipes de porter le brassard « One Love » soutenant activement les LGBTQ à la Coupe du Monde. Vous à la Fifa, vous avez perdu mon respect. (Face à) tout le travail que mes alliés et la communauté LGBTQ + accomplissent pour rendre le football inclusif, vous avez démontré que le football n’était pas un lieu ouvert à tous ».