L'épidémie de Covid-19 et l'explosion des denrées alimentaires et de l'énergie ont aggravé les inégalités à travers le monde qui ont atteint "des niveaux extrêmes et dangereux" qui accablent les faibles revenus et suscitent un sentiment d'injustice dans les sociétés.
Depuis dix ans, les milliardaires ont doublé leur fortune, tout en étant de plus en plus nombreux. Cette hausse est « six fois plus importante que l’augmentation des richesses des 50% les plus pauvres », précise le rapport, qui ajoute qu’au cours des dix dernières années, « les 1% les plus riches ont capté 74 fois plus de richesses que les 50% les plus pauvres ».
Comme toutes les années, Oxfam, qui réunit 21 organisations à travers le monde, estime que ces inégalités sont « une menace existentielle pour nos sociétés, paralysant notre capacité à endiguer la pauvreté ». « Les inégalités ne font pas qu’augmenter, elles s’accélèrent. Avec, d’une part, l’augmentation de l’extrême pauvreté et, de l’autre, une concentration toujours plus importante des richesses », explique Quentin Parrinello, responsable plaidoyer justice fiscale et inégalités d’Oxfam France et co-auteur du rapport.
La flambée des cours de la Bourse ont favorisé les grandes fortunes, qui ont vu doubler leurs fortunes. Ce qui déséquilibre encore plus l’écart entre pays riches et pays pauvres. En 2022, plusieurs pays africains ont par ailleurs été frappés plus durement que la moyenne mondiale par la forte inflation. « L’inflation du prix des denrées alimentaires en Ethiopie (44%), en Somalie (15%) et au Kenya (12%) [dépasse] celle des pays du G7 (10%) et la moyenne mondiale (9%) », précise le rapport. Dans un tel contexte, la Banque mondiale a annoncé que « l’objectif d’éradication de l’extrême pauvreté à l’horizon 2030 ne pourra pas être atteint », écrit également Oxfam.
Une telle richesse pourrait mettre fin à la pauvreté
Pour Oxfam, la taxation des super-riches est le seul moyen d’éradiquer la pauvreté et la faim dans le monde. Surtout qu’un grand nombre des milliardaires ne paient pratiquement pas d’impôts. Le taux d’imposition réel d’Elon Musk, l’un des hommes les plus riches du monde, ne serait que de 3,2%, et celui de Jeff Bezos, autre milliardaire, serait inférieur à 1% ». Imposer les milliardaires sur leur fortune contribuerait ainsi à lever 1 700 milliards de dollars par an, au niveau mondial, « ce qui permettrait par la suite aux gouvernements de financer des politiques sociales », précise Quentin Parrinello, qui estime que « les inégalités sont un choix politique ». Selon le rapport, cette somme serait « suffisante pour sortir 2 milliards de personnes de la pauvreté ». Parmi les mesures proposées dans le rapport, figurent un impôt exceptionnel sur la fortune, une taxe sur les dividendes et une hausse de l’imposition sur les revenus du travail et du capital des 1% les plus riches.
Oxfam prend l’exemple des 10 premiers milliardaires français, rappelant qu’à eux seuls, depuis le début de la pandémie, ils ont augmenté leur fortune de 189 milliards d’euros, « soit l’équivalent de deux ans de facture de gaz, d’électricité et de carburant » pour l’ensemble des Français, précise l’ONG. A ce titre, la fortune de Bernard Arnault, l’homme le plus riche du monde, a par exemple doublé depuis le début de la pandémie, passant de 85,7 milliards d’euros en 2020 à 179 milliards d’euros en 2022. Le PDG du groupe LVMH possède ainsi « une fortune équivalente à celle de 20 millions de Français », chiffre Oxfam France. A titre d’exemple, l’ONG estime que seuls 2% de la fortune actuelle des milliardaires français (544,5 milliards d’euros) suffirait à financer le système des retraites, sans avoir à passer par une réforme et un recul de l’âge légal de départ.
Reste à savoir comment de telles taxations pourraient être mises en oeuvre. Car c’est à chaque Etat de décider comment cet impôt extraordinaire pourrait être établi, les gouvernements, de droite comme de gauche, considérant que la symbolique de l’impôt sur la transmission des héritages pourrait être explosive.