Le Premier ministre sortant est largement vainqueur du premier tour des législatives mais sans majorité. Un deuxième tour sera nécessaire, dans un pays affaibli par des années de restrictions et par la crainte des élections turques.
Malgré plusieurs grands meetings qui ont attiré les foules, les législatives en Grèce se sont déroulées dans un climat de défaitisme. Par souci de sécurité, les électeurs ont préféré donner l’avantage à la Nouvelle-Démocratie, le parti conservateur de Kyriakos Mitsotakis, qui recueillait entre 36% et 40% des voix, loin devant le parti d’Alexis Tsipras, qui obtiendrait entre 25% et 29% des suffrages. Il faut admettre que la situation économique de la Grèce s’est nettement améliorée, avec une croissance de l’ordre de 6%, un tourisme à nouveau prospère, et le retour de la confiance des investisseurs étrangers. L’image du pays à l’étranger s’est nettement améliorée.
Mais on reproche au premier ministre une dérive autoritaire depuis son arrivée au pouvoir. Son mandat a été émaillé de scandales, des écoutes illégales, des refoulements de migrants et des violences policières. Et puis un grave accident ferroviaire, le 28 février dernier, a mis en lumière la vétusté de certains cervices publics, et une forte colère de la part de la population. De nombreux jeunes sont partis vivre à l’étranger. Malgré trois hausses successives du salaire minimum, la baisse du pouvoir d’achat reste la principale préoccupation d’une population qui a consenti de douloureux sacrifices ces dix dernières années. De nombreux Grecs doivent se contenter de bas salaires et ont perdu confiance dans des services publics réduits à peau de chagrin après des cures d’amaigrissement drastiques. Le pays ploie toujours sous une dette publique de plus de 170 % de son PIB. Et l’inflation a frôlé l’an dernier les 10 %, aggravant encore les difficultés de la population.
La crainte des élections turques et de l’immigration
Et quels que soit le résultat des élections turques à venir, les Grecs savent que le puissant voisin ne changera pas sa politique hostile sur de nombreux sujets, comme l’immigration, l’exploitation des ressources pétrolières en mer, le conflit politique en Chypre. Dans les dernières semaines de la campagne électorale turque, tous les partis se sont montrés très belliqueux envers la Grèce, un thème toujours porteur. La Turquie est actuellement en position de force dans la région depuis le début de la guerre en Ukraine et la Grèce n’est pas parvenue à créer un rapport de force équivalent.
Les résultats de la consultation populaire grecque ont aussi été marqués par une vidéo accablante, appuyée par une enquête du New YorkTimes, où l’on voit des migrants, enfants et des adultes, renvoyés et abandonnés en pleine mer par les garde-côtes grecs. Ils étaient déjà sur le sol grec, ils ont été emmenés de force et abandonnés sur une embarcation gonflable. Alors que ce lieu de passage entre la Turquie et les îles grecques égéennes, au moins 1700 migrants ont perdu la vie depuis 2014, parmi les plus de 20.000 disparus dans la Mer Méditerranée décomptés par l’Organisation internationale des migrations. «Leur calvaire aurait pu rester largement ignoré, comme ceux de tant d’autres demandeurs d’asile dont les récits de mauvais traitements ont été démentis par le gouvernement grec. Seulement à cette occasion, il a été capturé dans son intégralité sur vidéo», écrit le New York Times.
