Ce qui change avec l’entrée de Stockholm dans l’OTAN

Edouard Beros

Ce qui change avec l'entrée de Stockholm dans l'OTAN

« Profondeur stratégique » en mer Baltique comme en Arctique, mais aussi industrie aéronautique et de défense d’excellence. Ainsi Stockholm élève le mur de l’Alliance atlantique devant la Russie

La Suède est officiellement devenue membre de l’OTAN. Son adhésion, officialisée le 7 mars après un long bras de fer diplomatique avec la Turquie, met fin à près de deux siècles de neutralité de Stockholm et pourrait marquer le début d’une nouvelle phase pour l’Alliance atlantique non seulement dans la Baltique, mais aussi dans l’Arctique, de plus en plus stratégique (militairement et économiquement). Les maîtres mots sont « profondeur stratégique », innovation technologique et aéronautique. A décliner en pensant à la Russie de Vladimir Poutine.

Profondeur stratégique

Avec l’entrée de la Finlande, celle de la Suède ferme en quelque sorte le cercle de la défense de la Baltique aux objectifs potentiels de Moscou. Le pays scandinave, rappelle le centre d’études Centre Wilson, apporte trois nouvelles positions stratégiques à l’Alliance : le détroit d’Oresund, qui relie la mer du Nord à la mer Baltique, l’île de Gotland, la plus grande de la région et considérée comme une sorte de « porte-avions insubmersible » en raison de sa situation centrale dans les pays baltes et le littoral le long de la mer d’Aland et du golfe de Botnie, ce qui « permettra à l’Alliance de défendre plus facilement » la région des îles d’Aland. La Suède accroît sa présence militaire dans ces zones, notamment à Gotland : l’île est située à seulement 300 kilomètres de Kaliningrad, l’enclave russe de la mer Baltique que les analystes considèrent comme le talon d’Achille de l’Otan dans la région. Pour les experts, l’entrée de Stockholm et d’Helsinki dans l’Alliance affaiblirait les risques découlant de cette sorte de pince formée d’un côté par Kaliningrad, fortement militarisée par Moscou, et par la Biélorussie.

Aéronautiques

Ce qui pèse dans la balance dans ce domaine, c’est sans doute la puissance de feu de l’armée de l’air suédoise, l’une des plus importantes d’Europe grâce à une centaine d’avions de combat (vouée à augmenter dans les années à venir). Il y a exactement un an, la Suède signait un accord avec la Norvège, la Finlande et le Danemark pour intégrer les capacités aériennes et dissuader la Russie. Cette défense nordique du ciel devrait permettre aux États-Unis de réduire leur surveillance et leur présence aérienne dans la région.

Ensuite, il y a le fait que Stockholm « possède une flotte de sous-marins de classe mondiale, avec certains des sous-marins les plus avancés en opération, et une richesse de connaissances sur la navigation dans les eaux peu profondes de la mer Baltique » que ni les États-Unis ni les États-Unis Les Etats possèdent, la Russie, souligne le centre Wilson. La Suède dispose également de troupes amphibies mobiles spécialement conçues pour la rapidité et la flexibilité dans les zones côtières. Cela pourrait renforcer considérablement l’efficacité opérationnelle dans les environnements archipélagiques difficiles à naviguer, comme la côte estonienne. Sans oublier les bateaux de combat rapides, les aéroglisseurs et les chasseurs côtiers, utiles aussi bien pour la défense que pour d’éventuelles attaques.

Technologie et industrie de la défense

L’un des principaux avantages de l’adhésion de la Suède à l’OTAN réside dans son industrie militaire et technologique. « L’industrie de défense suédoise, l’une des plus importantes d’Europe, représentait 3 milliards de dollars en 2022, avec des exportations de matériel de défense totalisant plus de 2 milliards de dollars – lit-on dans le rapport du centre Wilson – Les plus grandes entreprises de défense du pays produisent certains des équipements les plus sophistiqués. sur le marché, comme le Jas 39 Gripen de Saab et le Combat Vehicle 90 de BAE System AB. » Il y a environ 28 000 personnes employées dans le secteur, mais ce nombre et la production sont appelés à augmenter après que le gouvernement a annoncé une augmentation considérable du budget annuel de la défense à partir de 2024, qui devrait être le double de celui alloué en 2020.

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Il faut ensuite considérer la contribution du secteur technologique. Il existe des entreprises leaders dans les technologies de la communication et de l’information comme Ericsson et Hexagon par exemple, ainsi qu’un écosystème qui continue d’attirer les startups et qui ont fait du pays une sorte de « Silicon Valley » de l’Europe. En 2020, le gouvernement a lancé le Cybercampus, une initiative qui renforce la coopération entre les forces de défense, les universités publiques et les entreprises privées pour contrer les menaces cyber et hybrides, dont la Russie a largement recours. Il ne faut pas sous-estimer le fait que la Suède possède de grandes quantités de minéraux critiques, comme le plus grand gisement de terres rares du continent, qui sont également fondamentaux pour l’industrie de défense.

L’arctic

Enfin, revenant au rôle géostratégique, le pays scandinave pourrait représenter un avant-poste supplémentaire pour l’OTAN dans la région arctique, qui revêt une importance croissante au niveau mondial pour le commerce et la défense. La fonte de la calotte glaciaire ouvre de nouvelles routes maritimes, mais ce qui est aussi et surtout attractif, c’est la présence d’hydrocarbures et de gisements minéraux. Dans ce domaine, la Russie a depuis longtemps étendu ses vues, et la Chine fait de même. Stockholm ne reste pas les bras croisés, comme le démontre la récente découverte du gisement de terres rares susmentionné, situé dans la région de Kiruna, au nord du cercle polaire arctique. Toujours dans ce domaine, la Suède a entamé la construction de deux nouvelles garnisons militaires en 2023.

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