Pourquoi l’extrême droite est-elle proche des animaux ?

Edouard Beros

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Beaucoup se posent la question sur la relation, à première vue surprenante, entre l’extrême droite et leur affection pour les animaux. Des figures politiques telles que Marine Le Pen, Matteo Salvini et Geert Wilders montrent régulièrement leur proximité avec les animaux, notamment sur les réseaux sociaux. Ceci pourrait s’interpréter comme une méthode pour adoucir leur image souvent associée à des idéologies xénophobes et identitaires. Mais le fond de cette démarche est bien plus stratégique et révélateur de certaines réalités politiques.

Stratégies politiques et valeur symbolique des animaux

La cause animale, dans le contexte de l’extrême droite, dépasse largement un simple amour pour les animaux. Elle s’intègre dans une stratégie politique visant à valider une certaine idéologie. Lucas Jakubowicz, journaliste politique, souligne que des partis comme le Rassemblement National (ex-FN) emploient la cause animale pour se positionner sur des sujets sensibles comme la viande halal. Cette thématique a été un des sujets phares pour Marine Le Pen, qui, en 2012, a exprimé des préoccupations concernant le bien-être animal en critiquant la méthode d’abattage halal. Cette démarche lui permettait d’adresser implicitement des critiques envers l’islam, essentiellement liées à ses postures anti-islam et xénophobes.

Cette utilisation des animaux se manifeste également dans des situations plus anecdotiques mais tout aussi significatives. Par exemple, le tweet de Fabien Engelmann, maire d’Hayange, célébrant le sauvetage de moutons durant l’Aïd el-Kébir, illustre cette dualité dans le message véhiculé. D’un côté, il semble œuvrer pour la cause animale, et de l’autre, il porte un message anti-musulman.

L’animal comme outil de dédiabolisation et machine à clics

Poser avec des animaux contribue également à la stratégie de dédiabolisation employée par des figures d’extrême droite. La mise en avant d’animaux, souvent perçus comme mignons et innocents, permet de projeter une image plus tendre et humaine des politiques. Marine Le Pen, en se présentant comme amoureuse des animaux et de la nature, cherche ainsi à se créer une image plus authentique et bienveillante. Cette stratégie semble toucher certaines parties de l’électorat qui la perçoivent comme plus humaine.

En parallèle, les animaux, surtout les chats, sont devenus de véritables « machines à clics » sur les réseaux sociaux. Leur présence générique et universellement appréciée en fait un sujet privilégié pour générer de l’engagement. Matteo Salvini et Geert Wilders, par exemple, utilisent régulièrement l’image de leurs chats pour atteindre un vaste public sur les plateformes numériques, grâce aussi à des tactiques comme celle de « La Bestia » permettant une maximisation de la viralité.

Contrastes et contradictions dans l’engagement pour la cause animale

Toutefois, malgré cette affinité affichée pour la cause animale, l’engagement réel sur le terrain de l’extrême droite présente de sérieux contrastes. Le Rassemblement National, bien qu’ayant dédié un livret à la protection animale lors de la dernière présidentielle, a montré des positions ambivalentes, notamment concernant la corrida. Cette dernière, présentée comme une tradition occidentale, bénéficie encore du support du parti dans les régions où elle est populièrement pratiquée, malgré les critiques portées par les défenseurs des droits des animaux.

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Les positions du RN sur d’autres sujets liés à la cause animale et à l’écologie révèlent également une certaine réticence à s’engager pleinement dans cette direction. Selon Stéphane François, docteur en science politique, bien que certains individus au sein du parti puissent défendre ces causes à titre personnel, le parti dans son ensemble fait preuve d’une absence de conscience écologique tangible.

En résumé, malgré une apparente proximité avec les animaux et l’utilisation stratégique de leur image, l’extrême droite montre des signes d’un engagement superficiel et parfois contradictoire par rapport à la cause animale. Cette démarche illustre une exploitation politique de l’affection pour les animaux, plutôt qu’une véritable sensibilité ou dévouement envers leur bien-être.

Perspectives d’avenir sur les enjeux de la cause animale

L’avenir nous en dira plus sur la manière dont la relation entre l’extrême droite et la cause animale va évoluer. Les contradictions entre l’affichage public et les actions concrètes doivent être scrutées attentivement par les électeurs et les défenseurs des droits des animaux. La réelle volonté de progresser sur la cause animale et écologique au sein de ces partis reste une question ouverte, probablement influencée par le poids des traditions et des idéologies qui les caractérisent.

Il est primordial de garder à l’esprit que, dans le domaine de la protection animale comme dans celui de l’écologie, les enjeux dépassent largement les clivages politiques traditionnels. La nécessité de défendre les droits des animaux et d’adopter une démarche plus écologique requiert une approche inclusive et transversale, qui ne saurait être pleinement efficace si elle est contrainte par des considérations idéologiques étroites. Seul l’avenir nous dira si l’extrême droite parviendra à concilier sa politique avec une véritable prise de conscience écologique et un engagement sincère en faveur de la cause animale.

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